Purgatif intellectuel
QUI SUIS-JE ?
L’art d’être soi-même est celui de n’être pas ce que l’on croit.
Le passé est une maladie incurable, n’en déplaise à la psychanalyse. Son nom : vivre à reculons. Son symptôme : se heurter aux rencontres plutôt que leur ouvrir les bras.
La jeunesse est une qualité infinie : être sans passé.
« Je ne sais rien de vous » — car vous êtes un être absolument singulier ; « je ne crois pas un mot de ce que vous me dites sur vous-même », car votre singularité échappe au langage en tant qu’il se donne de prime abord comme un réseau de codes. Chaque être humain appelle pour son expression une langue nouvelle. C’est pour cela qu’il y a la littérature, et tant d’échecs en littérature.
L’ego est à l’être authentique ce que la vulgarisation est à la science. L’ego est une vulgarisation de soi : exister sur un mode imagé ; se vendre. L’ego est un marketing de soi. L’ego est à l’être authentique ce qu’un slogan publicitaire est à un clair de lune dans le silence de la nuit.
Le sentiment du moi ne se maintient que par une contraction incessante des muscles internes de tout le corps, ceux qu’on ne peut actionner volontairement, contraction qui transforme l’espace disponible que l’on est en objet dense et séparé. Se détendre vraiment, c’est abandonner l’ego.
On ne hait que ce qu’on est.
Connaissance de soi : ne plus chercher le même, mais non pas chercher l’Autre. Chercher cela pour qui tout est Autre.
Ton visage vrai n’est donné qu’à l’autre. Oublie-le. N’en-visage que l’autre. Beau est le visage qui s’oublie pour un autre visage.
Le seul horizon du moi est sa propre souffrance.
Le moi est fait du refus de soi.
Si je regarde honnêtement tout ce par quoi je suis traversé, je ne reconnais rien qui m’appartienne. Même pas « moi ». Même « je désire » est faux. Le désir est sans sujet. C’est après l’acte que l’on reconnaît le passage du désir.
Ce qui me traverse n’est rien de moi. « Moi » fait partie de ce qui me traverse. « Me » ?
Singularité : je suis un être unique. Au sein du monde mais contre lui, l’ego ne sert qu’à délimiter l’espace de la singularité. Par malheur, ensuite, il l’occupe. La singularité, pourtant reconnaissante, a le plus grand mal à lui signifier son congé.
Le moi est un enfer que l’on ignore tant que l’on n’a pas pressenti l’éden de son retrait.
L’humain est combustible n’aspirant qu’à devenir feu.
La spiritualité est ce qui advient de moi-même dans l’espace du je ne sais pas.
Finitude de la conscience : l’espace du il y a ne produit pas ce qu’il y a.
Pourquoi est-ce alors que je suis un avec tout donné, au point qu’il n’y a plus aucun je à qui cela est donné, que se révèle un Je qui est l’autre absolu de tout donné ?
Dès que je ne prends pas toute la place à l’intérieur de moi se produit l’inattendu.
Chercher sa singularité en se différenciant est voué à l’échec. En prenant parti, dans mes idées, mes goûts et mes comportements, je m’enferme dans la particularité, confondant sans remède l’unique que je suis avec un ensemble de particularismes dont aucun n’est mon apanage et dont la synthèse ne peut atteindre qu’une vague originalité. La différenciation me relie aux autres en tant qu’ils sont les mêmes et m’en sépare en tant qu’ils sont autres ; elle me rapporte à moi-même en tant qu’identité et me coupe de ma véritable singularité.
Se particulariser, c’est prétendre être l’origine de sa propre singularité. Or, la singularité ne se manifeste que dans le retrait du moi-origine.
Tout ce qui n’est pas singularité est symptôme.
L’inconscient est la différence entre ce que l’on fait et ce que l’on croit faire.
Que le moi se retire est une chose ; une autre est ce qu’il devient : un « il », ou un Toi ?
La spiritualité authentique, ce n’est pas être un avec tout de telle sorte qu’il n’y ait plus l’autre ; c’est être un avec l’autre. Ce n’est pas supprimer la dualité au profit de l’Un, c’est être un avec le fait de la dualité pour que soit le trois qui unira les deux. Ce n’est pas l’autistique régression dans l’océan du Même, c’est aimer : risquer à chaque instant tout de soi-même afin que soit l’Autre.
Aucun désir d’être un nautiste du sentiment océanique.
Je suis : source de tout mais origine de rien : Fils.
L’homme ne se sait qu’en tant que même, et ne se connaît que comme autre. La connaissance de soi est connaissance du toujours autre que soi-même. On ne se connaît qu’en créant.
Rien de ce que tu es n’est qui tu es.
Le passé est une maladie incurable, n’en déplaise à la psychanalyse. Son nom : vivre à reculons. Son symptôme : se heurter aux rencontres plutôt que leur ouvrir les bras.
La jeunesse est une qualité infinie : être sans passé.
« Je ne sais rien de vous » — car vous êtes un être absolument singulier ; « je ne crois pas un mot de ce que vous me dites sur vous-même », car votre singularité échappe au langage en tant qu’il se donne de prime abord comme un réseau de codes. Chaque être humain appelle pour son expression une langue nouvelle. C’est pour cela qu’il y a la littérature, et tant d’échecs en littérature.
L’ego est à l’être authentique ce que la vulgarisation est à la science. L’ego est une vulgarisation de soi : exister sur un mode imagé ; se vendre. L’ego est un marketing de soi. L’ego est à l’être authentique ce qu’un slogan publicitaire est à un clair de lune dans le silence de la nuit.
Le sentiment du moi ne se maintient que par une contraction incessante des muscles internes de tout le corps, ceux qu’on ne peut actionner volontairement, contraction qui transforme l’espace disponible que l’on est en objet dense et séparé. Se détendre vraiment, c’est abandonner l’ego.
On ne hait que ce qu’on est.
Connaissance de soi : ne plus chercher le même, mais non pas chercher l’Autre. Chercher cela pour qui tout est Autre.
Ton visage vrai n’est donné qu’à l’autre. Oublie-le. N’en-visage que l’autre. Beau est le visage qui s’oublie pour un autre visage.
Le seul horizon du moi est sa propre souffrance.
Le moi est fait du refus de soi.
Si je regarde honnêtement tout ce par quoi je suis traversé, je ne reconnais rien qui m’appartienne. Même pas « moi ». Même « je désire » est faux. Le désir est sans sujet. C’est après l’acte que l’on reconnaît le passage du désir.
Ce qui me traverse n’est rien de moi. « Moi » fait partie de ce qui me traverse. « Me » ?
Singularité : je suis un être unique. Au sein du monde mais contre lui, l’ego ne sert qu’à délimiter l’espace de la singularité. Par malheur, ensuite, il l’occupe. La singularité, pourtant reconnaissante, a le plus grand mal à lui signifier son congé.
Le moi est un enfer que l’on ignore tant que l’on n’a pas pressenti l’éden de son retrait.
L’humain est combustible n’aspirant qu’à devenir feu.
La spiritualité est ce qui advient de moi-même dans l’espace du je ne sais pas.
Finitude de la conscience : l’espace du il y a ne produit pas ce qu’il y a.
Pourquoi est-ce alors que je suis un avec tout donné, au point qu’il n’y a plus aucun je à qui cela est donné, que se révèle un Je qui est l’autre absolu de tout donné ?
Dès que je ne prends pas toute la place à l’intérieur de moi se produit l’inattendu.
Chercher sa singularité en se différenciant est voué à l’échec. En prenant parti, dans mes idées, mes goûts et mes comportements, je m’enferme dans la particularité, confondant sans remède l’unique que je suis avec un ensemble de particularismes dont aucun n’est mon apanage et dont la synthèse ne peut atteindre qu’une vague originalité. La différenciation me relie aux autres en tant qu’ils sont les mêmes et m’en sépare en tant qu’ils sont autres ; elle me rapporte à moi-même en tant qu’identité et me coupe de ma véritable singularité.
Se particulariser, c’est prétendre être l’origine de sa propre singularité. Or, la singularité ne se manifeste que dans le retrait du moi-origine.
Tout ce qui n’est pas singularité est symptôme.
L’inconscient est la différence entre ce que l’on fait et ce que l’on croit faire.
Que le moi se retire est une chose ; une autre est ce qu’il devient : un « il », ou un Toi ?
La spiritualité authentique, ce n’est pas être un avec tout de telle sorte qu’il n’y ait plus l’autre ; c’est être un avec l’autre. Ce n’est pas supprimer la dualité au profit de l’Un, c’est être un avec le fait de la dualité pour que soit le trois qui unira les deux. Ce n’est pas l’autistique régression dans l’océan du Même, c’est aimer : risquer à chaque instant tout de soi-même afin que soit l’Autre.
Aucun désir d’être un nautiste du sentiment océanique.
Je suis : source de tout mais origine de rien : Fils.
L’homme ne se sait qu’en tant que même, et ne se connaît que comme autre. La connaissance de soi est connaissance du toujours autre que soi-même. On ne se connaît qu’en créant.
Rien de ce que tu es n’est qui tu es.
DÉSIR, ACCOMPLISSEMENT
Cela que cherche un être humain n’a pas de cause, et ne peut donc être provoqué. Si l’on accepte totalement cette impuissance, cela se produit.
Combien faut-il lâcher d’attentes pour être disponible à ce qui nous attend ?
Jouir est un oui du je au corps.
Tes désirs sont des ordres. Alors obéis-leur !
L’espoir a pour objet le connu ; l’espérance, l’inconnu. L’espérance est désir. Seul celui qui a su désespérer désire en vérité.
L’oisillon qui vient de plonger dans le vide a tout intérêt à assumer son acte en battant des ailes, plutôt que de les utiliser pour se voiler la face.
La tiédeur est une violence contre soi, redoublée par sa propre occultation. C’est pourquoi elle est la source de toute violence manifestée.
La tiédeur est une arme de destruction passive.
La passion est une tiédeur paroxystique.
Ne plus être vivant pour ne plus être mortel : éternité du tiède.
La mort est là pour nous rappeler de vivre.
Toute peur de la mort est un désir de vivre refusé.
Marcher avec la mort, pour ne pas passer à côté de la vie.
Mourir est le changement de point de vue le plus radical. C’est pourquoi philosopher y exerce.
La chair de l’homme sait, sans que l’homme le sache, que l’instant de la mort sera le lieu d’une seule question, à deux faces : quel désir n’as-tu pas vécu ? Quel vivre n’as-tu pas désiré ?
Être vivant justifie la vie.
Ne jamais oublier que tout instant comme toute rencontre est une première et une dernière fois.
S’abstenir de chercher, car chercher c’est savoir. Laisser l’inconnu rencontrer mon désir. Laisser mon besoin qui sait ses objets se muer en désir qui a pour objet ce qu’il ne sait pas. Je ne cherche pas, je me laisse trouver.
Le temps est l’ennemi du mental et l’allié du désir.
L’engagement ne peut être qu’infini. Car c’est l’infini qui s’engage. Sinon c’est simulacre.
D’un point de vue existentiel, mieux vaut échouer dans une grande aventure que de réussir une petite tentative.
On ne peut avoir assez que du même.
Si le moi est système d’identifications, c’est-à-dire de savoirs, le désir, qui a toujours pour objet ce qui échappe au savoir, dépasse et dissout le moi. Ce n’est donc pas le moi qui désire. Qui désire ?
Il n’y a pas de sujet du désir.
Tant que le moi se regarde lui-même, fut-ce mourir, il se maintient, puisque tout son être tient dans l’obsession de soi. La seule antidote au moi est le désir, qui n’a d’objet que le tout-autre. Regarder. Écouter. Humer. Goûter. Toucher. Vivre. Là, où est « moi » ?
Quand tu quêtes réassurance, souviens-toi que ta peur est la face obscure de ton désir, et que ton désir t’emmène inexorablement vers vivre ta peur. Souviens-toi que là seul est la joie.
Ce qui me fait peur est ce que je désire. Je ne m’en aperçois pas toujours parce que la peur déforme son objet. D’où la fécondité de cette question : qu’est-ce qui se désire dans ma peur ?
Le désir aspire à se vivre dans le monde. Le monde est construit sur la négation du désir. L’accomplissement du désir implique donc d’accueillir sa négation, sans jamais s’y résigner. Quand le désir souffre, vivre le désir, c’est souffrir.
Le désir va vers le tout-autre, il appelle donc l’autre que tout même : la mort — non la négation de la vie, mais la face obscure de son sommet.
Conscience : cela pour qui tout est autre. Désir : élan vers le tout-autre. La conscience est désir jouissant de lui-même. Le moi, identité immuable, est négation de la conscience et du désir.
Le désir est destin pour celui qui dit oui.
On reconnait les appels du désir à ce qu’ils sont impossibles et nécessaires. Le désir est un appel au miracle.
Le désir est inscription dans le corps de l’appel divin ; la volonté, dans sa vérité, est engagement total dans l’obéissance au désir.
Dès que l’on cesse de regarder la vie du point de vue du manque (je vois ce qui n’est pas, je ne vois pas ce qui est), naît la gratitude.
L’esprit désire, le corps aspire, au milieu je décide, au prix de la douleur d’être une chair vivante, de les laisser s’unir — ou non. Unique liberté.
Désir, immuable moteur.
L’ultime problème de l’homme de désir : vouloir cet accomplissement qui consiste à ne plus rien vouloir.
Réaliser désespérément qu’il s’agit là d’un problème sans solution révèle pour toujours l’inanité de tout problème. Destruction de la volonté, avènement du pur oui agissant.
Nul besoin de juger le réel pour y inscrire un désir humain.
Toi qui as eu l’imprudente sagesse de te laisser accrocher par ce qui te dépasse, le moindre de tes espoirs sera déçu jusqu’à l’ouverture, en toi, d’un espace pour l’Inespéré.
La pulsion veut toujours plus ; le désir aspire à toujours autre.
Tout éveil est un moyen ; malheur à qui l’atteint en en ayant fait son but : sa vie n’a plus de sens.
Le monstre contemporain : le sub-jectum éveillé ; l’homme sujet de son propre éveil. Luci-fer.
Nier rassure, car on sait toujours ce que l’on nie et l’on n’y ajoute rien en le niant. Le oui pur, quant à lui, aventure de ne rien exclure, est ouverture à l’insu, accueil de la dimension créatrice de la vie, pour le dire en un mot : désir.
Je nourris ce que je nie. Car la négation est attention ; et, plus encore, attention exclusive car sa logique est de prendre toute la place : le « je ne veux pas cela » se transforme en « je veux le non-cela ». Tout objet de mon désir est ainsi réduit à sa qualité de négation du connu que je refuse, donc nié dans son altérité d’inconnaissable. Par là, c’est la dynamique même de mon désir qui est niée. La négativité est le meurtre intérieur du désir. Le désir n’émerge que dans l’espace du oui.
Le désir est la Parole de Dieu dans le monde de la mort de Dieu. Les dernières volontés du Dieu mort. Ton vrai désir : le testament de Dieu.
Combien faut-il lâcher d’attentes pour être disponible à ce qui nous attend ?
Jouir est un oui du je au corps.
Tes désirs sont des ordres. Alors obéis-leur !
L’espoir a pour objet le connu ; l’espérance, l’inconnu. L’espérance est désir. Seul celui qui a su désespérer désire en vérité.
L’oisillon qui vient de plonger dans le vide a tout intérêt à assumer son acte en battant des ailes, plutôt que de les utiliser pour se voiler la face.
La tiédeur est une violence contre soi, redoublée par sa propre occultation. C’est pourquoi elle est la source de toute violence manifestée.
La tiédeur est une arme de destruction passive.
La passion est une tiédeur paroxystique.
Ne plus être vivant pour ne plus être mortel : éternité du tiède.
La mort est là pour nous rappeler de vivre.
Toute peur de la mort est un désir de vivre refusé.
Marcher avec la mort, pour ne pas passer à côté de la vie.
Mourir est le changement de point de vue le plus radical. C’est pourquoi philosopher y exerce.
La chair de l’homme sait, sans que l’homme le sache, que l’instant de la mort sera le lieu d’une seule question, à deux faces : quel désir n’as-tu pas vécu ? Quel vivre n’as-tu pas désiré ?
Être vivant justifie la vie.
Ne jamais oublier que tout instant comme toute rencontre est une première et une dernière fois.
S’abstenir de chercher, car chercher c’est savoir. Laisser l’inconnu rencontrer mon désir. Laisser mon besoin qui sait ses objets se muer en désir qui a pour objet ce qu’il ne sait pas. Je ne cherche pas, je me laisse trouver.
Le temps est l’ennemi du mental et l’allié du désir.
L’engagement ne peut être qu’infini. Car c’est l’infini qui s’engage. Sinon c’est simulacre.
D’un point de vue existentiel, mieux vaut échouer dans une grande aventure que de réussir une petite tentative.
On ne peut avoir assez que du même.
Si le moi est système d’identifications, c’est-à-dire de savoirs, le désir, qui a toujours pour objet ce qui échappe au savoir, dépasse et dissout le moi. Ce n’est donc pas le moi qui désire. Qui désire ?
Il n’y a pas de sujet du désir.
Tant que le moi se regarde lui-même, fut-ce mourir, il se maintient, puisque tout son être tient dans l’obsession de soi. La seule antidote au moi est le désir, qui n’a d’objet que le tout-autre. Regarder. Écouter. Humer. Goûter. Toucher. Vivre. Là, où est « moi » ?
Quand tu quêtes réassurance, souviens-toi que ta peur est la face obscure de ton désir, et que ton désir t’emmène inexorablement vers vivre ta peur. Souviens-toi que là seul est la joie.
Ce qui me fait peur est ce que je désire. Je ne m’en aperçois pas toujours parce que la peur déforme son objet. D’où la fécondité de cette question : qu’est-ce qui se désire dans ma peur ?
Le désir aspire à se vivre dans le monde. Le monde est construit sur la négation du désir. L’accomplissement du désir implique donc d’accueillir sa négation, sans jamais s’y résigner. Quand le désir souffre, vivre le désir, c’est souffrir.
Le désir va vers le tout-autre, il appelle donc l’autre que tout même : la mort — non la négation de la vie, mais la face obscure de son sommet.
Conscience : cela pour qui tout est autre. Désir : élan vers le tout-autre. La conscience est désir jouissant de lui-même. Le moi, identité immuable, est négation de la conscience et du désir.
Le désir est destin pour celui qui dit oui.
On reconnait les appels du désir à ce qu’ils sont impossibles et nécessaires. Le désir est un appel au miracle.
Le désir est inscription dans le corps de l’appel divin ; la volonté, dans sa vérité, est engagement total dans l’obéissance au désir.
Dès que l’on cesse de regarder la vie du point de vue du manque (je vois ce qui n’est pas, je ne vois pas ce qui est), naît la gratitude.
L’esprit désire, le corps aspire, au milieu je décide, au prix de la douleur d’être une chair vivante, de les laisser s’unir — ou non. Unique liberté.
Désir, immuable moteur.
L’ultime problème de l’homme de désir : vouloir cet accomplissement qui consiste à ne plus rien vouloir.
Réaliser désespérément qu’il s’agit là d’un problème sans solution révèle pour toujours l’inanité de tout problème. Destruction de la volonté, avènement du pur oui agissant.
Nul besoin de juger le réel pour y inscrire un désir humain.
Toi qui as eu l’imprudente sagesse de te laisser accrocher par ce qui te dépasse, le moindre de tes espoirs sera déçu jusqu’à l’ouverture, en toi, d’un espace pour l’Inespéré.
La pulsion veut toujours plus ; le désir aspire à toujours autre.
Tout éveil est un moyen ; malheur à qui l’atteint en en ayant fait son but : sa vie n’a plus de sens.
Le monstre contemporain : le sub-jectum éveillé ; l’homme sujet de son propre éveil. Luci-fer.
Nier rassure, car on sait toujours ce que l’on nie et l’on n’y ajoute rien en le niant. Le oui pur, quant à lui, aventure de ne rien exclure, est ouverture à l’insu, accueil de la dimension créatrice de la vie, pour le dire en un mot : désir.
Je nourris ce que je nie. Car la négation est attention ; et, plus encore, attention exclusive car sa logique est de prendre toute la place : le « je ne veux pas cela » se transforme en « je veux le non-cela ». Tout objet de mon désir est ainsi réduit à sa qualité de négation du connu que je refuse, donc nié dans son altérité d’inconnaissable. Par là, c’est la dynamique même de mon désir qui est niée. La négativité est le meurtre intérieur du désir. Le désir n’émerge que dans l’espace du oui.
Le désir est la Parole de Dieu dans le monde de la mort de Dieu. Les dernières volontés du Dieu mort. Ton vrai désir : le testament de Dieu.
ÉCRITURE, ÉCRIVANITÉ
Écrire, c’est conquérir sur l’imposture généralisée quelques moments d’intensité qui laissent une trace.
Le métier d’écrivain est une lutte contre l’écrivanité.
L’écri-vain écrit dans une langue morte.
Ceux que le siècle appelle ses penseurs ne sont qu’idéologues des courants dominants. Oser la solitude : penser hors de l’événement.
L’écrivain qui sait ce qu’il dit ne dira jamais que ce qu’il sait — un professeur de ses propres certitudes.
L’écri-vain a besoin que la stratégie qu’il adopte ait déjà remporté une bataille. C’est pourquoi il a toujours une guerre de retard. Mais les lauriers sont décernés par d’autres écri-vains, et l’on se fait rare sur le terrain du vrai combat.
L’écri-vain a le rapport à la vie propre aux gens de son milieu. Appartenir au milieu littéraire interdit la littérature.
L’écri-vain n’est pas homme à se laisser dépasser par ce qu’il écrit.
Le talent d’un écri-vain est une putain dont le maquereau s’appelle ego.
L’écrivanité est une habileté à n’exprimer rien de plus à ses contemporains que ce qu’ils consentent à savoir d’eux-même ; la littérature, quant à elle, ne dit à une époque que ce qu’elle refuse d’entendre.
Désespérer d’être compris : tel est le chemin de celui que la vie requiert pour une parole neuve.
Un critique littéraire est quelqu’un qui veut avoir le dernier mot d’une œuvre qu’il n’a pas écrite.
Le roman s’adresse au lieu d’où le monde se crée. Le traité philosophique, d’où il se comprend. Supériorité pratique du roman : il change le monde immédiatement.
Si on dit le réel, le pathos est entre les lignes ; si on dit le pathos, le réel n’est nulle part.
Un écrivain gagne à très vite laisser entendre pour qui il n’écrit pas.
Ce qu’on appelle le style est toujours le résultat d’un effort de vérité, jamais d’un effort de style. Qui cherche son style trouve une manière ; qui s’attache à un style perd une possibilité de l’écriture qui s’appelle la littérature. La véritable écriture tend vers l’abolition du style comme l’existence authentique vers la disparition de la personnalité. (Du coup, ils font de l’abolition un style…)
Le style est un souffle naissant d’un regard. Mais ils regardent leur style.
Il règnent sur leur style. Je sers mes livres.
La matière véritable de la littérature n’est pas la langue, mais la palette des distances, l’indéfinie totalité des regards possibles ensemble. Ce chaos dans l’ordre de la langue.
On peut écrire du point de vue de la laideur, mais que signifie la laideur, sinon la nostalgie de la beauté ? On peut écrire depuis cette nostalgie-là, et la laideur alors devient belle.
Souffrance ou joie, zénith de l’intensité : il n’est d’authentique écrivain qui n’ait un jour rencontré l’indicible. Perte de la langue ? Non. Perte d’un certain usage du langage : le langage comme milieu matriciel où, tout étant narrable, aucun vécu n’est à ce point singulier qu’il ne puisse se vivre qu’en solitude. Langage amniotique. C’est une fois traversée la solitude qu’est rendu viable cette autre voie : la littérature. Voix de l’inouï, qui dit ce qui jamais n’a fait l’objet d’aucun récit, et ne peut en faire l’objet. Langue de l’unique.
Beaucoup croient inventer de la littérature, quand ils ne sont que relais d’une nouvelle langue amniotique, secrétée par un certain milieu socio-culturel auto-constitué en matrice — forteresse contre les assauts de l’intense. Traverser cette perte du langage au surcroît du vivant. Traverser la solitude, cette intime reconnaissance que tout est singularité, première, seule et unique fois. Naître écrivain. La langue peut porter l’unique ! C’est l’homme qui, souvent, ne le supporte pas.
La vraie parole est silence agissant. Mais elle aussi est faite de mots. Les mêmes mots. Mais vides. Vider les mots de vouloir-dire. Alors, ils se gorgent eux-même de sens.
Le métier d’écrivain est une lutte contre l’écrivanité.
L’écri-vain écrit dans une langue morte.
Ceux que le siècle appelle ses penseurs ne sont qu’idéologues des courants dominants. Oser la solitude : penser hors de l’événement.
L’écrivain qui sait ce qu’il dit ne dira jamais que ce qu’il sait — un professeur de ses propres certitudes.
L’écri-vain a besoin que la stratégie qu’il adopte ait déjà remporté une bataille. C’est pourquoi il a toujours une guerre de retard. Mais les lauriers sont décernés par d’autres écri-vains, et l’on se fait rare sur le terrain du vrai combat.
L’écri-vain a le rapport à la vie propre aux gens de son milieu. Appartenir au milieu littéraire interdit la littérature.
L’écri-vain n’est pas homme à se laisser dépasser par ce qu’il écrit.
Le talent d’un écri-vain est une putain dont le maquereau s’appelle ego.
L’écrivanité est une habileté à n’exprimer rien de plus à ses contemporains que ce qu’ils consentent à savoir d’eux-même ; la littérature, quant à elle, ne dit à une époque que ce qu’elle refuse d’entendre.
Désespérer d’être compris : tel est le chemin de celui que la vie requiert pour une parole neuve.
Un critique littéraire est quelqu’un qui veut avoir le dernier mot d’une œuvre qu’il n’a pas écrite.
Le roman s’adresse au lieu d’où le monde se crée. Le traité philosophique, d’où il se comprend. Supériorité pratique du roman : il change le monde immédiatement.
Si on dit le réel, le pathos est entre les lignes ; si on dit le pathos, le réel n’est nulle part.
Un écrivain gagne à très vite laisser entendre pour qui il n’écrit pas.
Ce qu’on appelle le style est toujours le résultat d’un effort de vérité, jamais d’un effort de style. Qui cherche son style trouve une manière ; qui s’attache à un style perd une possibilité de l’écriture qui s’appelle la littérature. La véritable écriture tend vers l’abolition du style comme l’existence authentique vers la disparition de la personnalité. (Du coup, ils font de l’abolition un style…)
Le style est un souffle naissant d’un regard. Mais ils regardent leur style.
Il règnent sur leur style. Je sers mes livres.
La matière véritable de la littérature n’est pas la langue, mais la palette des distances, l’indéfinie totalité des regards possibles ensemble. Ce chaos dans l’ordre de la langue.
On peut écrire du point de vue de la laideur, mais que signifie la laideur, sinon la nostalgie de la beauté ? On peut écrire depuis cette nostalgie-là, et la laideur alors devient belle.
Souffrance ou joie, zénith de l’intensité : il n’est d’authentique écrivain qui n’ait un jour rencontré l’indicible. Perte de la langue ? Non. Perte d’un certain usage du langage : le langage comme milieu matriciel où, tout étant narrable, aucun vécu n’est à ce point singulier qu’il ne puisse se vivre qu’en solitude. Langage amniotique. C’est une fois traversée la solitude qu’est rendu viable cette autre voie : la littérature. Voix de l’inouï, qui dit ce qui jamais n’a fait l’objet d’aucun récit, et ne peut en faire l’objet. Langue de l’unique.
Beaucoup croient inventer de la littérature, quand ils ne sont que relais d’une nouvelle langue amniotique, secrétée par un certain milieu socio-culturel auto-constitué en matrice — forteresse contre les assauts de l’intense. Traverser cette perte du langage au surcroît du vivant. Traverser la solitude, cette intime reconnaissance que tout est singularité, première, seule et unique fois. Naître écrivain. La langue peut porter l’unique ! C’est l’homme qui, souvent, ne le supporte pas.
La vraie parole est silence agissant. Mais elle aussi est faite de mots. Les mêmes mots. Mais vides. Vider les mots de vouloir-dire. Alors, ils se gorgent eux-même de sens.
SOUFFRANCE, GUÉRISON
L’âme n’est jamais malade que de ses efforts pour ne pas rencontrer la souffrance.
Le lieu où ça souffre est le même que le lieu où ça jouit : c’est le lieu où ça vit — la chair. Le refus de la souffrance est incapacité à jouir et refus de la vie.
Une souffrance n’est insupportable que dans la mesure où elle est vécue tellement accompagnée de son refus qu’elle en semble indissociable : alors, la possibilité de son acceptation n’apparaît plus ; le chemin de la joie est coupé. Une souffrance quelle qu’elle soit, vécue sans refus, est non seulement supportable, mais encore un chemin vers la joie.
Le lieu d’où nous nous demandons de quoi nous souffrons est cela-même dont nous souffrons.
Suis-je obligé d’être malheureux quand rien ne va comme je veux ? Je ne reçois aucun ordre des événements.
Aimer son corps, c’est aimer son histoire. Non les récits de son histoire. Mais les strates du passé dont sont faites les mémoires du corps. Aimer les poupées russes, qui, simultanément présentes mais pour la plupart invisibles, sentent, ressentent, éprouvent, sont passibles à chaque instant, en rapport avec le moindre événement de la vie actuelle.
Parce que le oui transforme tout, il n’est rien à quoi l’on ne puisse dire oui.
On ne manque jamais que de ne pas donner ce dont on croit manquer.
La joie n’est pas préférable à la souffrance. La joie, c’est ne plus préférer.
Confier la souffrance au corps : c’est redevenir entier. Par ma coïncidence aux flux du sentir, la présence irrigue à nouveau les espaces charnels désertés qui morcelaient mon être. Corps mû par l’unité : Je suis la danse.
La souffrance est une interprétation de l’intensité. La joie en est une autre. Souffrir ma souffrance, mais ne pas souffrir de ma souffrance.
Renoncer à toute intervention sur le flux d’affects dont je suis l’espace.
La joie est toute petite : c’est s’oublier. Noyau d’indifférence à soi, invisible à l’ego qui n’est que souci de soi. Décevante. Mais toute vraie puissance en procède.
La souffrance n’est ni bonne ni mauvaise. La juger, c’est tenter de s’en soulager. Elle vient, elle est là, elle est partie. Pas de quoi en faire un récit. Simple état transitoire de ma chair, dénué de sens comme de cause. Aimer sa propre chair, c’est vivre la souffrance sans se protéger.
La souffrance est à vivre avec curiosité.
Seule crée la folie l’incapacité du monde à la vérité.
La joie accompagne la tristesse accueillie ; car la tristesse est un état du vivant, et la joie se réjouit du vivant. Faut-il être obnubilé par le refus de la tristesse pour ne plus sentir la joie du vivant ! La joie se donne avec le moindre acquiescement au sentir.
La vie n’a pas de sens lorsqu’on attache de l’importance à ses propres souffrances.
S’accueillir est la condition nécessaire de l’authentique changement. Car ce qui seul peut et doit changer dans le rapport à soi, c’est précisément la volonté de se changer soi-même. La sommation de se poser en origine de soi est le conditionnement suprême de la modernité, on le nomme subjectivité. Quand cela est lâché, quand le sujet, principe fictif d’une identité imaginaire, se retire, alors tout est changement.
L’espoir empêche de vivre. Tout le sens de ma vie est donné dans ma vie d’aujourd’hui. Je reçois à chaque instant tout ce qu’il m’est permis d’espérer. Espérer, c’est refuser le don du présent. Tant que du soulagement est accroché à une éventualité, fasse le Ciel qu’elle ne m’échoie pas ! Il n’est d’autre voie que de vivre maintenant ce dont je me soulage en espérant. Pour cela, désespérer.
De peur de le rendre fou, ne lui en dites rien : il n’est à craindre que pour celui qui craint.
Depuis le ventre maternel, ce qui protège un être humain est toujours aussi sa prison.
Tout ce que l’on peut quitter est prison. Que ne peut-on pas quitter ?
Douleur et joie s’unissent dans l’intensité du vivant.
La vérité guérit, mais elle ne soulage pas.
Rien n’éloigne plus du bonheur que de penser l’avoir trouvé, si ce n’est croire pouvoir l’obtenir.
La souffrance est la porte de l’instant. L’instant est la porte de la joie.
Ne cesse jamais d’observer ceci : avec la souffrance, tu peux être heureux ; si tu la refuses, tu es en enfer.
Accueillir la souffrance est nécessairement au-dessus de mes forces, puisque moi s’est intégralement construit sur le refus de celle-ci. Le choix de l’intensité est au-delà du moi.
Sans tiédeur, la personnalité rencontrera nécessairement la grande peur contre laquelle elle s’est construite. Grâce du vivant. Sans tiédeur, je n’éviterai les événements qui me terrifient que si je traverse intérieurement tout ce qu’ils me feraient.
Nos angoisses sont des métaphores de la grande peur contre laquelle notre personnalité s’est construite. Nos haines et nos rejets en sont des métonymies. Stylistique de l’ombre.
Toute souffrance est du corps. Le « psychisme » n’est autre qu’un système de récits qui attache toute sensation à des circonstances du monde. Désadhérer à ces récits libère la conscience du psychisme en détachant la chair du monde. Le sentir est détachement.
Sois un avec l’enfer car l’enfer c’est être deux.
Si tu cèdes à la pulsion, tu ne sens plus rien, tu es mort un moment ; si tu n’y cèdes pas, tu souffres, tu pleures, tu es vivant. Si tu es vivant, joie !
Tout ce que je cherche m’est donné ici et maintenant, seul le chercher m’en sépare.
Mes tentatives pour m’emparer de ce qui aspire à se donner à moi me rendent inapte à le recevoir.
Renoncer à manipuler le monde pour régner sur mes états : premier détachement, celui de la conscience et du monde. Renoncer à intervenir dans le flux d’affects dont je suis l’espace : second détachement, celui de la conscience et du sensoriel. Libre du monde et du vécu, la conscience se dévoile à elle-même.
L’illusion que tendre vers des objets est la juste attitude existentielle est dûe au fait que la possession de l’objet est le moment d’une suspension de la tension, qui ne dure que le temps de prendre conscience que ce dernier n’est en aucune manière source de l’apaisement recherché. La possession d’un objet ne me détend que dans la mesure où elle est le seul instant de ma vie où je ne tends plus vers la détente que doit me procurer l’objet.
La thérapie commence lorsqu’on met des mots sur le pur sentir ; la guérison quand on cesse de le faire.
Qu’est-ce qui peut m’empêcher d’être heureux sans raison ?
Qui sait être heureux de rien est heureux de tout.
Le lieu où ça souffre est le même que le lieu où ça jouit : c’est le lieu où ça vit — la chair. Le refus de la souffrance est incapacité à jouir et refus de la vie.
Une souffrance n’est insupportable que dans la mesure où elle est vécue tellement accompagnée de son refus qu’elle en semble indissociable : alors, la possibilité de son acceptation n’apparaît plus ; le chemin de la joie est coupé. Une souffrance quelle qu’elle soit, vécue sans refus, est non seulement supportable, mais encore un chemin vers la joie.
Le lieu d’où nous nous demandons de quoi nous souffrons est cela-même dont nous souffrons.
Suis-je obligé d’être malheureux quand rien ne va comme je veux ? Je ne reçois aucun ordre des événements.
Aimer son corps, c’est aimer son histoire. Non les récits de son histoire. Mais les strates du passé dont sont faites les mémoires du corps. Aimer les poupées russes, qui, simultanément présentes mais pour la plupart invisibles, sentent, ressentent, éprouvent, sont passibles à chaque instant, en rapport avec le moindre événement de la vie actuelle.
Parce que le oui transforme tout, il n’est rien à quoi l’on ne puisse dire oui.
On ne manque jamais que de ne pas donner ce dont on croit manquer.
La joie n’est pas préférable à la souffrance. La joie, c’est ne plus préférer.
Confier la souffrance au corps : c’est redevenir entier. Par ma coïncidence aux flux du sentir, la présence irrigue à nouveau les espaces charnels désertés qui morcelaient mon être. Corps mû par l’unité : Je suis la danse.
La souffrance est une interprétation de l’intensité. La joie en est une autre. Souffrir ma souffrance, mais ne pas souffrir de ma souffrance.
Renoncer à toute intervention sur le flux d’affects dont je suis l’espace.
La joie est toute petite : c’est s’oublier. Noyau d’indifférence à soi, invisible à l’ego qui n’est que souci de soi. Décevante. Mais toute vraie puissance en procède.
La souffrance n’est ni bonne ni mauvaise. La juger, c’est tenter de s’en soulager. Elle vient, elle est là, elle est partie. Pas de quoi en faire un récit. Simple état transitoire de ma chair, dénué de sens comme de cause. Aimer sa propre chair, c’est vivre la souffrance sans se protéger.
La souffrance est à vivre avec curiosité.
Seule crée la folie l’incapacité du monde à la vérité.
La joie accompagne la tristesse accueillie ; car la tristesse est un état du vivant, et la joie se réjouit du vivant. Faut-il être obnubilé par le refus de la tristesse pour ne plus sentir la joie du vivant ! La joie se donne avec le moindre acquiescement au sentir.
La vie n’a pas de sens lorsqu’on attache de l’importance à ses propres souffrances.
S’accueillir est la condition nécessaire de l’authentique changement. Car ce qui seul peut et doit changer dans le rapport à soi, c’est précisément la volonté de se changer soi-même. La sommation de se poser en origine de soi est le conditionnement suprême de la modernité, on le nomme subjectivité. Quand cela est lâché, quand le sujet, principe fictif d’une identité imaginaire, se retire, alors tout est changement.
L’espoir empêche de vivre. Tout le sens de ma vie est donné dans ma vie d’aujourd’hui. Je reçois à chaque instant tout ce qu’il m’est permis d’espérer. Espérer, c’est refuser le don du présent. Tant que du soulagement est accroché à une éventualité, fasse le Ciel qu’elle ne m’échoie pas ! Il n’est d’autre voie que de vivre maintenant ce dont je me soulage en espérant. Pour cela, désespérer.
De peur de le rendre fou, ne lui en dites rien : il n’est à craindre que pour celui qui craint.
Depuis le ventre maternel, ce qui protège un être humain est toujours aussi sa prison.
Tout ce que l’on peut quitter est prison. Que ne peut-on pas quitter ?
Douleur et joie s’unissent dans l’intensité du vivant.
La vérité guérit, mais elle ne soulage pas.
Rien n’éloigne plus du bonheur que de penser l’avoir trouvé, si ce n’est croire pouvoir l’obtenir.
La souffrance est la porte de l’instant. L’instant est la porte de la joie.
Ne cesse jamais d’observer ceci : avec la souffrance, tu peux être heureux ; si tu la refuses, tu es en enfer.
Accueillir la souffrance est nécessairement au-dessus de mes forces, puisque moi s’est intégralement construit sur le refus de celle-ci. Le choix de l’intensité est au-delà du moi.
Sans tiédeur, la personnalité rencontrera nécessairement la grande peur contre laquelle elle s’est construite. Grâce du vivant. Sans tiédeur, je n’éviterai les événements qui me terrifient que si je traverse intérieurement tout ce qu’ils me feraient.
Nos angoisses sont des métaphores de la grande peur contre laquelle notre personnalité s’est construite. Nos haines et nos rejets en sont des métonymies. Stylistique de l’ombre.
Toute souffrance est du corps. Le « psychisme » n’est autre qu’un système de récits qui attache toute sensation à des circonstances du monde. Désadhérer à ces récits libère la conscience du psychisme en détachant la chair du monde. Le sentir est détachement.
Sois un avec l’enfer car l’enfer c’est être deux.
Si tu cèdes à la pulsion, tu ne sens plus rien, tu es mort un moment ; si tu n’y cèdes pas, tu souffres, tu pleures, tu es vivant. Si tu es vivant, joie !
Tout ce que je cherche m’est donné ici et maintenant, seul le chercher m’en sépare.
Mes tentatives pour m’emparer de ce qui aspire à se donner à moi me rendent inapte à le recevoir.
Renoncer à manipuler le monde pour régner sur mes états : premier détachement, celui de la conscience et du monde. Renoncer à intervenir dans le flux d’affects dont je suis l’espace : second détachement, celui de la conscience et du sensoriel. Libre du monde et du vécu, la conscience se dévoile à elle-même.
L’illusion que tendre vers des objets est la juste attitude existentielle est dûe au fait que la possession de l’objet est le moment d’une suspension de la tension, qui ne dure que le temps de prendre conscience que ce dernier n’est en aucune manière source de l’apaisement recherché. La possession d’un objet ne me détend que dans la mesure où elle est le seul instant de ma vie où je ne tends plus vers la détente que doit me procurer l’objet.
La thérapie commence lorsqu’on met des mots sur le pur sentir ; la guérison quand on cesse de le faire.
Qu’est-ce qui peut m’empêcher d’être heureux sans raison ?
Qui sait être heureux de rien est heureux de tout.
RIRE
Un violon, s’il le pouvait, prendrait son violoniste très au sérieux.
Que serait un violon se prenant au sérieux ?…
– Eh, manche à cordes, grince un peu plus bas ! Je m’appelle Stradivarius
– Mon pauvre ami, vous le voyez bien : plus aucun musicien ne tire de vous le moindre son. C’est que vos cordes ont enflé. Moi, j’en conviens, je suis un violon très moyen, mais au moins l’on joue de moi…
Les gens qui se prennent au sérieux ne prennent au sérieux que les gens qui se prennent au sérieux.
Ne pas se prendre au jeu au point d’oublier que c’est un jeu. Mais ne jamais dire : « ce n’est qu’un jeu ». Car rien n’est plus sérieux. Se souvenir du jeu permet de ne rien prendre au sérieux dans le jeu ; mais celui qui mesure ce qu’est le jeu ne peut que prendre celui-ci au sérieux.
L’humour est la mise en scène de la seule question vraiment sérieuse : qu’est-ce qui est véritablement digne de sérieux ?
Toute comédie a pour thème la prison que l’on est à soi-même.
Au plus fort de la tragédie, il s’agit de garder assez de sens de la comédie pour ne pas trouver un ultime refuge dans une posture tragique.
Un personnage de tragédie est un personnage de comédie confronté à la mort.
Quand nous pourrions être à chaque instant, par rapport au moi, dans la situation du spectateur de théâtre qui assiste à une bonne comédie (quel plaisir), nous voilà identifié au personnage qui se débat sur scène.
Le rire dissout tout savoir et l’ego qui en est fait.
Les gens qui se prennent au sérieux ne prennent au sérieux que les gens qui se prennent au sérieux.
Ne pas se prendre au jeu au point d’oublier que c’est un jeu. Mais ne jamais dire : « ce n’est qu’un jeu ». Car rien n’est plus sérieux. Se souvenir du jeu permet de ne rien prendre au sérieux dans le jeu ; mais celui qui mesure ce qu’est le jeu ne peut que prendre celui-ci au sérieux.
L’humour est la mise en scène de la seule question vraiment sérieuse : qu’est-ce qui est véritablement digne de sérieux ?
Toute comédie a pour thème la prison que l’on est à soi-même.
Au plus fort de la tragédie, il s’agit de garder assez de sens de la comédie pour ne pas trouver un ultime refuge dans une posture tragique.
Un personnage de tragédie est un personnage de comédie confronté à la mort.
Quand nous pourrions être à chaque instant, par rapport au moi, dans la situation du spectateur de théâtre qui assiste à une bonne comédie (quel plaisir), nous voilà identifié au personnage qui se débat sur scène.
Le rire dissout tout savoir et l’ego qui en est fait.
MASCULIN, FÉMININ
Il faut pousser le féminisme jusqu’à un tel point d’intensité qu’il ne soit plus concevable sans un masculinisme de même intensité.
Le désir et la jouissance du Féminin est d’accomplir la volonté du Masculin. L’homme et la femme devaient mimer cette structure verticale de l’être pour se l’incorporer, tel est le sens de cinq millénaires de patriarcat.
Mais le mime a dégénéré en singerie et il est plus que temps, pour l’homme ivre de testostérone, d’entendre et de réaliser ceci : Ce Père que tu inventes ou que tu nies, tu n’accèderas à sa Volonté vraie qu’en devenant Femme. Qu’homme et femme deviennent Femme : terre désirante ouverte à l’inconnu d’un Ciel sans repère.
La femme pense qu’elle manque de ce que l’homme a ; l’homme feint de posséder ce dont il croit que la femme manque.
Le désir et la jouissance du Féminin est d’accomplir la volonté du Masculin. L’homme et la femme devaient mimer cette structure verticale de l’être pour se l’incorporer, tel est le sens de cinq millénaires de patriarcat.
Mais le mime a dégénéré en singerie et il est plus que temps, pour l’homme ivre de testostérone, d’entendre et de réaliser ceci : Ce Père que tu inventes ou que tu nies, tu n’accèderas à sa Volonté vraie qu’en devenant Femme. Qu’homme et femme deviennent Femme : terre désirante ouverte à l’inconnu d’un Ciel sans repère.
La femme pense qu’elle manque de ce que l’homme a ; l’homme feint de posséder ce dont il croit que la femme manque.
BÊTISE, INTELLIGENCE… VÉRITÉ
Certains philosophes parlent de la fin de la métaphysique comme un imbécile parlerait de la fin de l’intelligence.
Transformer les limites de son horizon de compréhension en loi universelle permet la pose au monde la moins passible de mise en question intellectuelle : celle de législateur en matière de sens.
La bêtise est décision d’ignorer le mystère décidant de s’ignorer elle-même, limitation de l’intelligence qui se croit loi de l’intelligence.
Quiconque part en guerre contre sa propre bêtise (c’est-à-dire : est philosophe) affronte inévitablement celle de son temps ; car il en est fait.
Le système ? Nous en sommes faits.
Faute d’oser cette vérité, quiconque prétendra lutter contre le système ne le fera jamais que depuis celui-ci. Car c’est une force du système de savoir organiser le théâtre de sa propre contestation. Tout rebelle qui dit « moi » est un pantin de la comédie du jour, un apôtre inconscient de ce qu’il croit combattre.
Toute question qui n’est pas métaphysique est un symptôme.
Plus je suis niais, plus je suis vrai. La niaiserie avisée, virginité de l’intelligence, est un non-savoir émerveillé. Quelle force de déconstruction, quelle menace, quel scandale pour la mentalité des masses… Si l’on exige de chacun l’exhibition publique d’un minimum d’intellectualité, c’est pour protéger les récits dont est tissé le monde commun de la puissance du niais. Impératif social de mimer celui à qui on ne la fait pas, l’averti qui toujours a déjà vécu, au moins pensé, tout ce qu’il vit. Ainsi le Moderne, sommé de se poser en expert de sa propre existence, en ignore-t-il passionnément le mystère.
Ne plus raisonner, apprendre à résonner. N’être qu’espace de résonance. Naître per-sonne.
Au pays des aveugles, les borgnes sont priés de fermer leur gueule.
La réalité a le droit d’être différente de mes peurs, mes attentes et mes représentations. Je lui donne ce droit. Sans quoi, distraitement, je la peins aux pauvres couleurs de mes pensées. Ce qui m’y conforte et m’y enferme sans remède, puisque la « réalité » les confirme. On vit sa dimension créatrice comme on peut : le même ou l’autre ? L’ego est l’impérialisme du même colonisant le monde ; la pensée moderne en a fait la dignité suprême de l’homme. Devenir humain, c’est se consentir totalement passible de l’Autre.
La nature est innocente parce qu’elle se moque de l’innocence.
Chaque pensée ne sert qu’à fuir. Quand la conscience s’impose de demeurer dans l’être-là de la chair, vient un temps où penser cesse. Silence. La vie se révèle comme joie, au lieu même où son intensité se donnait comme souffrance. Naît alors une pensée autre.
L’inquiétude cherche le sens derrière la lettre. Ainsi la lettre est-elle manquée, mais aussi l’esprit, qui n’est pas derrière, mais dans la lettre. « Dans », au sens où l’on dirait que le mouvement est « dans » le corps qui bouge, la danse « dans » le corps du danseur…
Rien ne veut rien dire. Entendre le sens dans l’innocence : virginité de l’intelligence.
La vraie question est silence orienté vers l’unique.
J’appelle erreur une vérité qui n’a pas coûté cher. Vérité, une erreur qui crée.
La singularité d’une pensée tient dans sa totalité. Celle-ci n’est jamais pleinement donnée. Mais elle en constitue l’horizon : l’impossible et nécessaire expression langagière d’un regard. Le regard, lieu de l’unique, donne le monde. Le regard crée. Pour cela, l’analyse d’éléments communs entre deux vraies pensées manquera toujours l’essentiel : ce souffle qui circule entre les éléments et les relie invisiblement, cette unité unique inexprimable et n’aspirant qu’à son expression. Lire une oeuvre ou, aussi, entrer en relation avec un être humain vivant quelque chose de son humanité, c’est essayer un monde possible. Ce qui est tout autre chose que laisser son propre regard recouvert par ce monde de tous et que l’on dit réel.
Le monde tient pour vrai ce qui le maintient en état.
Ne plus concevoir, pour que soit l’inconcevable.
L’affirmation est vraie. La négation est fausse. Le vrai est mélangé au faux dès que l’affirmation s’appuie sur la négation. La vérité est positivité. La positivité est fécondité.
J’appelle imbécile celui qui pense pour ne pas sentir.
En ce sens, bien des intellectuels sont des imbéciles professionnels.
Il n’y a que des manières de dire. Mais alors, dire quoi ?
Adhérez à ma pensée et vous serez guéris de l’adhésion.
Le contraire d’une erreur est une erreur.
La philosophie, c’est l’esprit de contre-addiction.
Ne rien comprendre à ce monde de dingue est la marque d’une intelligence éveillée.
Vierge de savoir, m’étonner toujours ; prêt à chaque instant, n’être jamais surpris.
Tout est faux, car rien n’est tout. Tout est vrai, car il n’est vérité que du tout. Logique de la vie — lui donner corps !
Le parler juste provient du corps, d’une incorporation du sens. Incarnation du Verbe.
La pensée vraie distingue pour servir l’Unité.
« Toute pensée est vraie dans ce qu’elle affirme et fausse dans ce qu’elle nie » : géniale intuition leibnizienne ; car une pensée ne peut nier qu’en dehors de son champ propre, et la négation est précisément le signe de cet errement épistémologique. Ainsi la raison scientifique nie l’expérience religieuse ; les religions se nient les unes les autres ; les philosophies se construisent sur la réfutation de celles qui les ont précédées… De même que le moi, à l’adolescence, construit le champ de sa singularité par le rejet systématique de ses influences mais ne pourra accomplir celle-ci, adulte, que par l’affirmation paisible de son propre, une pensée mûre est pur oui.
Une pensée affirmative ne s’autorisera de nier que les négations des autres pensées. Si elle a du temps à perdre.
Le réductionnisme est négation, celle de l’existence d’un champ autre. Toute pensée réductionniste doit être reconduite à son champ propre. Que cette opération réduise à chaque fois ses dimensions dévoile tout réductionnisme comme mégalomanie théorique.
Toute affirmation est vraie dans son champ propre. Une affirmation fausse est une négation déguisée ou une vérité déplacée.
Une vérité ne trouve sa place qu’en lui accordant tout son contenu de vérité. Il convient donc de l’endosser pleinement, ce qui ne signifie pas y adhérer : car adhérer à une vérité, c’est refuser d’endosser son contraire. Or, on ne donne à une vérité la totalité de son contenu de vérité que lorsque on saisit en même temps la vérité de son contraire.
Rien de ce qui est ne rend raison du fait qu’il y a.
L’artiste trouve la beauté en cherchant la vérité ; le scientifique la vérité en cherchant la beauté. Formule du génie. Beauté et vérité sont les deux pôles de l’être.
Candeur dit blancheur, virginité du regard inapte à percevoir ce qui ne se donne pas. C’est-à-dire à construire. Toute la perception (dualité du monde et du moi) repose sur la mise en relation de ce qui apparaît avec ce qui n’apparaît pas et, conjointement, sur l’obscurcissement de ce qui, apparaissant, ne cadre pas avec cette relation. Construction, sélection impitoyable au cœur de la foison du donné. Perte de la candeur. La voie de se refaire une virginité après cette absolue défloration de l’être appelle évidemment un miracle ! Ne pas s’attacher au caché. Ignorer l’inapparent. Folie de la vision pure. Dé-mence du sentir. La profondeur est fiction. La vision pure est vertigineuse, car elle donne soudain ce qui fut occulté par la construction du moi et du monde. La recherche compulsive du caché, de la profondeur des choses, est fondée sur le sentiment diffus que la fiction du moi et du monde repose sur une occultation de l’apparaître pur, du foisonnement créateur du sensoriel. Mais l’on cherche alors avec le regard même qui a perdu ce que l’on cherche — et que la candeur seule révèle. Car l’occulté, pur apparaître, est totalement donné.
La bêtise est décision d’ignorer le mystère décidant de s’ignorer elle-même, limitation de l’intelligence qui se croit loi de l’intelligence.
Quiconque part en guerre contre sa propre bêtise (c’est-à-dire : est philosophe) affronte inévitablement celle de son temps ; car il en est fait.
Le système ? Nous en sommes faits.
Faute d’oser cette vérité, quiconque prétendra lutter contre le système ne le fera jamais que depuis celui-ci. Car c’est une force du système de savoir organiser le théâtre de sa propre contestation. Tout rebelle qui dit « moi » est un pantin de la comédie du jour, un apôtre inconscient de ce qu’il croit combattre.
Toute question qui n’est pas métaphysique est un symptôme.
Plus je suis niais, plus je suis vrai. La niaiserie avisée, virginité de l’intelligence, est un non-savoir émerveillé. Quelle force de déconstruction, quelle menace, quel scandale pour la mentalité des masses… Si l’on exige de chacun l’exhibition publique d’un minimum d’intellectualité, c’est pour protéger les récits dont est tissé le monde commun de la puissance du niais. Impératif social de mimer celui à qui on ne la fait pas, l’averti qui toujours a déjà vécu, au moins pensé, tout ce qu’il vit. Ainsi le Moderne, sommé de se poser en expert de sa propre existence, en ignore-t-il passionnément le mystère.
Ne plus raisonner, apprendre à résonner. N’être qu’espace de résonance. Naître per-sonne.
Au pays des aveugles, les borgnes sont priés de fermer leur gueule.
La réalité a le droit d’être différente de mes peurs, mes attentes et mes représentations. Je lui donne ce droit. Sans quoi, distraitement, je la peins aux pauvres couleurs de mes pensées. Ce qui m’y conforte et m’y enferme sans remède, puisque la « réalité » les confirme. On vit sa dimension créatrice comme on peut : le même ou l’autre ? L’ego est l’impérialisme du même colonisant le monde ; la pensée moderne en a fait la dignité suprême de l’homme. Devenir humain, c’est se consentir totalement passible de l’Autre.
La nature est innocente parce qu’elle se moque de l’innocence.
Chaque pensée ne sert qu’à fuir. Quand la conscience s’impose de demeurer dans l’être-là de la chair, vient un temps où penser cesse. Silence. La vie se révèle comme joie, au lieu même où son intensité se donnait comme souffrance. Naît alors une pensée autre.
L’inquiétude cherche le sens derrière la lettre. Ainsi la lettre est-elle manquée, mais aussi l’esprit, qui n’est pas derrière, mais dans la lettre. « Dans », au sens où l’on dirait que le mouvement est « dans » le corps qui bouge, la danse « dans » le corps du danseur…
Rien ne veut rien dire. Entendre le sens dans l’innocence : virginité de l’intelligence.
La vraie question est silence orienté vers l’unique.
J’appelle erreur une vérité qui n’a pas coûté cher. Vérité, une erreur qui crée.
La singularité d’une pensée tient dans sa totalité. Celle-ci n’est jamais pleinement donnée. Mais elle en constitue l’horizon : l’impossible et nécessaire expression langagière d’un regard. Le regard, lieu de l’unique, donne le monde. Le regard crée. Pour cela, l’analyse d’éléments communs entre deux vraies pensées manquera toujours l’essentiel : ce souffle qui circule entre les éléments et les relie invisiblement, cette unité unique inexprimable et n’aspirant qu’à son expression. Lire une oeuvre ou, aussi, entrer en relation avec un être humain vivant quelque chose de son humanité, c’est essayer un monde possible. Ce qui est tout autre chose que laisser son propre regard recouvert par ce monde de tous et que l’on dit réel.
Le monde tient pour vrai ce qui le maintient en état.
Ne plus concevoir, pour que soit l’inconcevable.
L’affirmation est vraie. La négation est fausse. Le vrai est mélangé au faux dès que l’affirmation s’appuie sur la négation. La vérité est positivité. La positivité est fécondité.
J’appelle imbécile celui qui pense pour ne pas sentir.
En ce sens, bien des intellectuels sont des imbéciles professionnels.
Il n’y a que des manières de dire. Mais alors, dire quoi ?
Adhérez à ma pensée et vous serez guéris de l’adhésion.
Le contraire d’une erreur est une erreur.
La philosophie, c’est l’esprit de contre-addiction.
Ne rien comprendre à ce monde de dingue est la marque d’une intelligence éveillée.
Vierge de savoir, m’étonner toujours ; prêt à chaque instant, n’être jamais surpris.
Tout est faux, car rien n’est tout. Tout est vrai, car il n’est vérité que du tout. Logique de la vie — lui donner corps !
Le parler juste provient du corps, d’une incorporation du sens. Incarnation du Verbe.
La pensée vraie distingue pour servir l’Unité.
« Toute pensée est vraie dans ce qu’elle affirme et fausse dans ce qu’elle nie » : géniale intuition leibnizienne ; car une pensée ne peut nier qu’en dehors de son champ propre, et la négation est précisément le signe de cet errement épistémologique. Ainsi la raison scientifique nie l’expérience religieuse ; les religions se nient les unes les autres ; les philosophies se construisent sur la réfutation de celles qui les ont précédées… De même que le moi, à l’adolescence, construit le champ de sa singularité par le rejet systématique de ses influences mais ne pourra accomplir celle-ci, adulte, que par l’affirmation paisible de son propre, une pensée mûre est pur oui.
Une pensée affirmative ne s’autorisera de nier que les négations des autres pensées. Si elle a du temps à perdre.
Le réductionnisme est négation, celle de l’existence d’un champ autre. Toute pensée réductionniste doit être reconduite à son champ propre. Que cette opération réduise à chaque fois ses dimensions dévoile tout réductionnisme comme mégalomanie théorique.
Toute affirmation est vraie dans son champ propre. Une affirmation fausse est une négation déguisée ou une vérité déplacée.
Une vérité ne trouve sa place qu’en lui accordant tout son contenu de vérité. Il convient donc de l’endosser pleinement, ce qui ne signifie pas y adhérer : car adhérer à une vérité, c’est refuser d’endosser son contraire. Or, on ne donne à une vérité la totalité de son contenu de vérité que lorsque on saisit en même temps la vérité de son contraire.
Rien de ce qui est ne rend raison du fait qu’il y a.
L’artiste trouve la beauté en cherchant la vérité ; le scientifique la vérité en cherchant la beauté. Formule du génie. Beauté et vérité sont les deux pôles de l’être.
Candeur dit blancheur, virginité du regard inapte à percevoir ce qui ne se donne pas. C’est-à-dire à construire. Toute la perception (dualité du monde et du moi) repose sur la mise en relation de ce qui apparaît avec ce qui n’apparaît pas et, conjointement, sur l’obscurcissement de ce qui, apparaissant, ne cadre pas avec cette relation. Construction, sélection impitoyable au cœur de la foison du donné. Perte de la candeur. La voie de se refaire une virginité après cette absolue défloration de l’être appelle évidemment un miracle ! Ne pas s’attacher au caché. Ignorer l’inapparent. Folie de la vision pure. Dé-mence du sentir. La profondeur est fiction. La vision pure est vertigineuse, car elle donne soudain ce qui fut occulté par la construction du moi et du monde. La recherche compulsive du caché, de la profondeur des choses, est fondée sur le sentiment diffus que la fiction du moi et du monde repose sur une occultation de l’apparaître pur, du foisonnement créateur du sensoriel. Mais l’on cherche alors avec le regard même qui a perdu ce que l’on cherche — et que la candeur seule révèle. Car l’occulté, pur apparaître, est totalement donné.
CROIRE, SAVOIR ET CROIRE SAVOIR
La décision de ne pas croire appartient au registre de la croyance au même titre que la décision de croire.
Quand on ignore, on ne peut que croire ; quand on ignore qu’on ignore, on ne peut même plus croire. On devient « savant ».
La matière n’est pas plus capable de fabriquer la conscience qu’un téléviseur ses émissions.
Le corps, bien sûr, ne peut percevoir que le corporel ; mais la pensée, qui ne se perçoit plus elle-même, affirme : il n’y a que le corporel ! Sottise du siècle : la cécité érigée en dogme.
« Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes » ? Y a-t-il à croire en la lampe, où à observer ce qu’elle éclaire ?
Le Diable a raison, mais il n’a que raison. Il règne sur le déterminisme. Il affirme que Job est prévisible, qu’il le connait. Dieu soutient que Job est un mystère qui va les surprendre. Dieu a la foi. Le Diable a raison si l’homme se laisse expliquer en répudiant l’inexplicable. Mais si l’homme aime ou crée, il fait mentir celui qui ne sait qu’avoir raison.
Le choix humain : donner raison au menteur, ou faire mentir le raisonneur. C’est-à-dire : se soulager ou vivre. Car ce qui nous enchaîne aux causes et aux effets, c’est la logique de l’animal, ce fuyard de l’intense. Vivre, ici, maintenant, là où ça souffre, là où ça jouit : être chair déjoue les leurres du Malin.
Laisser causer l’adorateur des causes, qui se réjouit d’être un effet de ce qu’il sait.
Le réalisme est faux, certain qu’il y a des choses.
Un scientifique n’a de pouvoir que sur un monde sans magie. Le scientiste nie la magie pour avoir tout pouvoir sur le monde. Les Lumières : une simple guerre de pouvoir ?
Il est certain que celui qui ne croit qu’aux lois dans la nature verra le monde lui donner raison. Celui qui veut la certitude l’achète toujours au prix du miracle. Celui qui désire le miracle au prix de la certitude.
Il n’est pas irrationnel de mettre la rationalité à sa place.
Tout est livré au hasard. Par quel hasard ce que tu dis serait-il vrai ?
Un tort des nazis n’était pas de cultiver la force, mais de ne croire qu’en elle. De même, on peut être rationnel sans être rationaliste.
Ce qui échappe à la démarche scientifique est ce qui se refuse à la mesure, le qualitatif pur : une sensation, un sentiment, un horizon de sens… Tout ce qui relève de la chair. L’affirmation selon laquelle ce qui transcende la mesure est par principe réductible au domaine de la démarche scientifique est une affirmation non pas scientifique mais métaphysique, car elle porte sur la relation entre le domaine de la démarche scientifique et ce qui lui échappe. Le matérialisme scientifique est méthodologique ou métaphysique, ce qui veut dire qu’il n’est scientifique que dans la mesure où il est méthodologique. Un matérialiste est un croyant. La seule question philosophique pertinente que pose la croyance matérialiste est celle de son bénéfice. Tomber amoureux, voir naître son enfant, contempler un coucher de soleil… Que gagne celui qui est parvenu à se faire croire que les événements de son existence sont arrivés à son cerveau ? Que le domaine sur lequel il règne n’ait pas de dehors. Régner sur le corps-sans-autre d’un monde dont on s’est soi-même abstrait. C’est l’esprit du Malin : se placer dans un hors champ que l’on pose en même temps comme impossible, à l’abri de l’intensité charnelle au sein d’une pensée pure qui s’est niée dans son principe même. La vie, privée de vie, perd son sens. Il faut ainsi toujours plus de domination pour croire échapper à la gueule béante du dieu-Chaos.
L’éveil : la conscience se connaît elle-même comme cela pour qui tout est autre.
L’autopositionnement de l’esprit scientifique est un simulacre de l’éveil. Prenant le tout pour objet, la conscience savante se pose en autre que tout tout en s’ignorant comme cela pour qui tout est autre. La science est singe de l’illumination.
Il n’y a de matérialisme que pour une pure pensée s’ignorant elle-même. Ainsi le fait du matérialisme en est-il la réfutation.
La volonté de savoir est compulsion à régner sans partage sur un objet sans autre dont le sujet du savoir, sans vouloir le savoir, est l’autre. Ainsi l’homme du savoir se voue-t-il sans remède à l’inconnaissance de soi.
L’évolutionniste regarde la mutation comme une anomalie dans un univers de répétition. Le savant, dans sa compulsion à savoir, tient pour normal le ressassement des choses et s’alarmera de la moindre nouveauté. L’artiste verra plutôt la création comme une règle et s’étonnera de ses exceptions. Qui a une seule fois contemplé la nature rêvera d’un Darwin aux yeux d’artiste. Oser, pour vivre, ce défi au savoir, cet appel à connaître : la nature crée.
On ne peut aller vers ce qu’on ne sait pas sans la destruction de tout ce que l’on sait, ce mensonge.
Ils savent les lois, non la limite des lois. Car ils veulent savoir sans limite.
Ils dévoilent le non-libre non par goût de la liberté, mais du savoir — dont ils sont ainsi prisonniers.
L’existence du savoir est un mythe.
Comme le sacheur moderne qui ne voit que la matière objet de son savoir est absent de son corps ! Regarder marcher un scientifique réfute la modernité.
L’esprit est pulsionnellement matérialiste, le corps instinctivement spiritualiste : oscillation de l’humain tant que la tâche de l’Unité n’est pas assumée. (Un esprit subtil comprendra par là que le matérialisme est le signe paradoxal d’une ère de l’Esprit.)
Savoir, c’est parier sur la répétition des choses.
L’affirmation que rien n’échappe au savoir ne peut faire l’objet d’aucun savoir.
Il n’est de savoir que d’une proposition conditionnelle, ce qui signifie qu’il n’est de savoir que sous condition. L’affirmation du caractère potentiellement illimité du savoir résulte donc d’une méconnaissance de la nature du savoir. Or, cet aveuglement est une conséquence de la décision de savoir. En effet, la décision de savoir est celle de ne rien connaître de ce qui échappe au savoir. Mutilation de la connaissance, pour l’illusion de posséder un infini. Savoir implique ainsi une triple ignorance : celle de la nature de la connaissance, celle de la nature du savoir, et celle du réel.
La logique aristotélicienne est fondée sur la décision existentielle de faire abstraction du temps. Le est de la proposition A est A est un présent d’éternité ; or, le principe d’identité prétend s’appliquer à des objets qui sont dans le temps. Dans le cadre de cette logique, l’énoncé d’une vérité se fonde donc sur la construction d’un simulacre d’éternité qui est en réalité une négation du temps. C’est dans le monde de la science que le Moderne voudrait vivre. Ainsi est-il en guerre contre le temps. L’urgence, le stress, symptômes aristotéliciens.
Le Moderne a commencé par décider discrètement de ne rien connaître du réel qui ne soit mathématisable, puis s’est extasié de cette correspondance merveilleuse entre les lois de son esprit et celles du monde. Toute décision de savoir se fonde sur une décision d’ignorer qui doit elle-même être ignorée pour que tienne l’illusion du savoir.
La rationalité est une méthode de déduction à partir de la position d’un principe. Deux conséquences. Le choix d’un principe est a-rationnel. Poser la rationalité en principe est irrationnel.
L’homme de savoir élimine passionnément du champ de sa perception tout ce que lui seul peut sentir. Le savoir est un combat contre la solitude. Le savoir élimine la singularité.
Quand on ignore, on ne peut que croire ; quand on ignore qu’on ignore, on ne peut même plus croire. On devient « savant ».
La matière n’est pas plus capable de fabriquer la conscience qu’un téléviseur ses émissions.
Le corps, bien sûr, ne peut percevoir que le corporel ; mais la pensée, qui ne se perçoit plus elle-même, affirme : il n’y a que le corporel ! Sottise du siècle : la cécité érigée en dogme.
« Les Grecs ont-ils cru à leurs mythes » ? Y a-t-il à croire en la lampe, où à observer ce qu’elle éclaire ?
Le Diable a raison, mais il n’a que raison. Il règne sur le déterminisme. Il affirme que Job est prévisible, qu’il le connait. Dieu soutient que Job est un mystère qui va les surprendre. Dieu a la foi. Le Diable a raison si l’homme se laisse expliquer en répudiant l’inexplicable. Mais si l’homme aime ou crée, il fait mentir celui qui ne sait qu’avoir raison.
Le choix humain : donner raison au menteur, ou faire mentir le raisonneur. C’est-à-dire : se soulager ou vivre. Car ce qui nous enchaîne aux causes et aux effets, c’est la logique de l’animal, ce fuyard de l’intense. Vivre, ici, maintenant, là où ça souffre, là où ça jouit : être chair déjoue les leurres du Malin.
Laisser causer l’adorateur des causes, qui se réjouit d’être un effet de ce qu’il sait.
Le réalisme est faux, certain qu’il y a des choses.
Un scientifique n’a de pouvoir que sur un monde sans magie. Le scientiste nie la magie pour avoir tout pouvoir sur le monde. Les Lumières : une simple guerre de pouvoir ?
Il est certain que celui qui ne croit qu’aux lois dans la nature verra le monde lui donner raison. Celui qui veut la certitude l’achète toujours au prix du miracle. Celui qui désire le miracle au prix de la certitude.
Il n’est pas irrationnel de mettre la rationalité à sa place.
Tout est livré au hasard. Par quel hasard ce que tu dis serait-il vrai ?
Un tort des nazis n’était pas de cultiver la force, mais de ne croire qu’en elle. De même, on peut être rationnel sans être rationaliste.
Ce qui échappe à la démarche scientifique est ce qui se refuse à la mesure, le qualitatif pur : une sensation, un sentiment, un horizon de sens… Tout ce qui relève de la chair. L’affirmation selon laquelle ce qui transcende la mesure est par principe réductible au domaine de la démarche scientifique est une affirmation non pas scientifique mais métaphysique, car elle porte sur la relation entre le domaine de la démarche scientifique et ce qui lui échappe. Le matérialisme scientifique est méthodologique ou métaphysique, ce qui veut dire qu’il n’est scientifique que dans la mesure où il est méthodologique. Un matérialiste est un croyant. La seule question philosophique pertinente que pose la croyance matérialiste est celle de son bénéfice. Tomber amoureux, voir naître son enfant, contempler un coucher de soleil… Que gagne celui qui est parvenu à se faire croire que les événements de son existence sont arrivés à son cerveau ? Que le domaine sur lequel il règne n’ait pas de dehors. Régner sur le corps-sans-autre d’un monde dont on s’est soi-même abstrait. C’est l’esprit du Malin : se placer dans un hors champ que l’on pose en même temps comme impossible, à l’abri de l’intensité charnelle au sein d’une pensée pure qui s’est niée dans son principe même. La vie, privée de vie, perd son sens. Il faut ainsi toujours plus de domination pour croire échapper à la gueule béante du dieu-Chaos.
L’éveil : la conscience se connaît elle-même comme cela pour qui tout est autre.
L’autopositionnement de l’esprit scientifique est un simulacre de l’éveil. Prenant le tout pour objet, la conscience savante se pose en autre que tout tout en s’ignorant comme cela pour qui tout est autre. La science est singe de l’illumination.
Il n’y a de matérialisme que pour une pure pensée s’ignorant elle-même. Ainsi le fait du matérialisme en est-il la réfutation.
La volonté de savoir est compulsion à régner sans partage sur un objet sans autre dont le sujet du savoir, sans vouloir le savoir, est l’autre. Ainsi l’homme du savoir se voue-t-il sans remède à l’inconnaissance de soi.
L’évolutionniste regarde la mutation comme une anomalie dans un univers de répétition. Le savant, dans sa compulsion à savoir, tient pour normal le ressassement des choses et s’alarmera de la moindre nouveauté. L’artiste verra plutôt la création comme une règle et s’étonnera de ses exceptions. Qui a une seule fois contemplé la nature rêvera d’un Darwin aux yeux d’artiste. Oser, pour vivre, ce défi au savoir, cet appel à connaître : la nature crée.
On ne peut aller vers ce qu’on ne sait pas sans la destruction de tout ce que l’on sait, ce mensonge.
Ils savent les lois, non la limite des lois. Car ils veulent savoir sans limite.
Ils dévoilent le non-libre non par goût de la liberté, mais du savoir — dont ils sont ainsi prisonniers.
L’existence du savoir est un mythe.
Comme le sacheur moderne qui ne voit que la matière objet de son savoir est absent de son corps ! Regarder marcher un scientifique réfute la modernité.
L’esprit est pulsionnellement matérialiste, le corps instinctivement spiritualiste : oscillation de l’humain tant que la tâche de l’Unité n’est pas assumée. (Un esprit subtil comprendra par là que le matérialisme est le signe paradoxal d’une ère de l’Esprit.)
Savoir, c’est parier sur la répétition des choses.
L’affirmation que rien n’échappe au savoir ne peut faire l’objet d’aucun savoir.
Il n’est de savoir que d’une proposition conditionnelle, ce qui signifie qu’il n’est de savoir que sous condition. L’affirmation du caractère potentiellement illimité du savoir résulte donc d’une méconnaissance de la nature du savoir. Or, cet aveuglement est une conséquence de la décision de savoir. En effet, la décision de savoir est celle de ne rien connaître de ce qui échappe au savoir. Mutilation de la connaissance, pour l’illusion de posséder un infini. Savoir implique ainsi une triple ignorance : celle de la nature de la connaissance, celle de la nature du savoir, et celle du réel.
La logique aristotélicienne est fondée sur la décision existentielle de faire abstraction du temps. Le est de la proposition A est A est un présent d’éternité ; or, le principe d’identité prétend s’appliquer à des objets qui sont dans le temps. Dans le cadre de cette logique, l’énoncé d’une vérité se fonde donc sur la construction d’un simulacre d’éternité qui est en réalité une négation du temps. C’est dans le monde de la science que le Moderne voudrait vivre. Ainsi est-il en guerre contre le temps. L’urgence, le stress, symptômes aristotéliciens.
Le Moderne a commencé par décider discrètement de ne rien connaître du réel qui ne soit mathématisable, puis s’est extasié de cette correspondance merveilleuse entre les lois de son esprit et celles du monde. Toute décision de savoir se fonde sur une décision d’ignorer qui doit elle-même être ignorée pour que tienne l’illusion du savoir.
La rationalité est une méthode de déduction à partir de la position d’un principe. Deux conséquences. Le choix d’un principe est a-rationnel. Poser la rationalité en principe est irrationnel.
L’homme de savoir élimine passionnément du champ de sa perception tout ce que lui seul peut sentir. Le savoir est un combat contre la solitude. Le savoir élimine la singularité.
MODERNITÉ
L’homme moderne a fait de son intelligence un dieu, sans se poser la question de savoir s’il s’agissait là d’un choix intelligent. Or ce n’est pas le cas, et l’homme adore aujourd’hui ce dont il est le plus dépourvu.
J’appelle modernes ceux qui croient qu’en comprenant un moteur ils sauront où va la voiture.
La lucidité est une lumière qui ne sait éclairer que le déjà-vu. Le comble de l’aveuglement est d’être dupe de sa propre lucidité. C’est celui de l’homme qui s’est nommé « moderne ».
L’homme a des jambes pour se perdre. C’est pour cela que l’homme moderne veut les utiliser le moins possible.
À l’heure où les repères égarent, le seul repère est l’égarement. S’égarer pour ne pas se perdre.
La modernité est le temps où le bonheur est obscène et la joie un devoir.
La modernité ne laisse aux plus doués de ceux qui ne dépassent pas son horizon que le cynisme et l’ironie.
Poser, c’est s’inscrire dans un système de dépendance : la pose n’existant que par le regard des autres, ceux-ci sont en droit d’exiger de moi une reconnaissance de leur propre pose en échange de celle qu’ils me consentent. La pose est l’essence de l’ego, la racine de l’illusion existentielle. Le monde est le système de poses le plus englobant.
La toute-puissance des marchands se nourrit de la volonté de toute-puissance de chacun sur les états qui traversent sa propre chair.
Le miracle, c’est la Vie, la Vie créatrice qui métamorphose à chaque instant ses créations : mort-naissance à chaque instant. Tout est miracle. L’anormal, est ce qui se fige, se cristallise, s’arrête : l’objet du savant. Le Moderne habite à ce point le sous-naturel qu’il a nommé surnaturel la simple norme du vivant.
Non réenchanter le monde, mais s’enchanter d’un monde désenchanté.
Je reproche aux nihilistes gonflés d’eux-mêmes de ne pas vivre le néant dont ils font vitrine. Ils se soulagent du désespoir en le propageant. Qu’ils naissent au rien qu’ils sont, ils se découvriront espace pour de l’autre qu’eux-mêmes. Vécu, le nihilisme est dépassé.
Perte de soi irrémédiable, pour celui dont le système de défenses est validé par l’environnement au point de lui offrir le triomphe. Le monde malade sélectionne des malades adaptés qui ne font qu’aggraver son dérangement. L’intellectuel réfugié dans la pensée pour ne pas vivre son incarnation devient le Prince de ce monde à l’envers sur lequel, en appliquant ses idées, il projette son refus d’être vivant. Ainsi, inexorablement, descend-on. Mais toi ?
La confusion du symptôme et de la maladie est la maladie de la modernité. L’humanité meurt de combattre ce qu’elle devrait entendre.
L’ego est une fiction nécessaire. Aucune consistance ontologique, mais la tâche de délimiter un espace pour l’émergence de la singularité. En situation de Retrait du fondement ontologique, il est demandé à l’ego de tenir cette place. L’ego qui n’a pas suffisamment de consistance pour s’assurer de sa propre existence se retrouve à porter celle du monde ! Et l’on s’étonne que le moderne soit tendu.
Le sage contemple l’infini. Le saint porte l’infini dans le fini. Le héros est porté par l’infini. Une espèce inédite unira les trois éveils ; on le nommera : l’Humain. Appel d’aujourd’hui.
L’initiation du héros : épreuve du viscéral, affronter charnellement le monstre féminin. Œdipe l’élude, le voici plongé dans le chaos pulsionnel. Où l’on voit que la figure de l’intellectuel se construit sur le fantasme du triomphe héroïque sans l’héroïsme. La couronne et la princesse sans l’étreinte du dragon. Maman, corps sans autre dont je suis Dieu. Mais en ce lieu précis du plus grand péril humain est la plus haute voie : Œdipe initiera Thésée. Naturellement, je ne parle ici que de la modernité.
Le moi des Modernes, plutôt que de constater son impuissance à être l’origine de son propre bonheur, préfère mettre son bonheur dans le fait d’être l’origine de soi.
Le savoir construit un monde qui n’a pas de sens, s’accordant parfaitement avec les métaphysiques qui proposent des moyens pour en sortir. Le parfait Postmoderne est confortablement scientifique et bouddhiste.
J’appelle modernes ceux qui croient qu’en comprenant un moteur ils sauront où va la voiture.
La lucidité est une lumière qui ne sait éclairer que le déjà-vu. Le comble de l’aveuglement est d’être dupe de sa propre lucidité. C’est celui de l’homme qui s’est nommé « moderne ».
L’homme a des jambes pour se perdre. C’est pour cela que l’homme moderne veut les utiliser le moins possible.
À l’heure où les repères égarent, le seul repère est l’égarement. S’égarer pour ne pas se perdre.
La modernité est le temps où le bonheur est obscène et la joie un devoir.
La modernité ne laisse aux plus doués de ceux qui ne dépassent pas son horizon que le cynisme et l’ironie.
Poser, c’est s’inscrire dans un système de dépendance : la pose n’existant que par le regard des autres, ceux-ci sont en droit d’exiger de moi une reconnaissance de leur propre pose en échange de celle qu’ils me consentent. La pose est l’essence de l’ego, la racine de l’illusion existentielle. Le monde est le système de poses le plus englobant.
La toute-puissance des marchands se nourrit de la volonté de toute-puissance de chacun sur les états qui traversent sa propre chair.
Le miracle, c’est la Vie, la Vie créatrice qui métamorphose à chaque instant ses créations : mort-naissance à chaque instant. Tout est miracle. L’anormal, est ce qui se fige, se cristallise, s’arrête : l’objet du savant. Le Moderne habite à ce point le sous-naturel qu’il a nommé surnaturel la simple norme du vivant.
Non réenchanter le monde, mais s’enchanter d’un monde désenchanté.
Je reproche aux nihilistes gonflés d’eux-mêmes de ne pas vivre le néant dont ils font vitrine. Ils se soulagent du désespoir en le propageant. Qu’ils naissent au rien qu’ils sont, ils se découvriront espace pour de l’autre qu’eux-mêmes. Vécu, le nihilisme est dépassé.
Perte de soi irrémédiable, pour celui dont le système de défenses est validé par l’environnement au point de lui offrir le triomphe. Le monde malade sélectionne des malades adaptés qui ne font qu’aggraver son dérangement. L’intellectuel réfugié dans la pensée pour ne pas vivre son incarnation devient le Prince de ce monde à l’envers sur lequel, en appliquant ses idées, il projette son refus d’être vivant. Ainsi, inexorablement, descend-on. Mais toi ?
La confusion du symptôme et de la maladie est la maladie de la modernité. L’humanité meurt de combattre ce qu’elle devrait entendre.
L’ego est une fiction nécessaire. Aucune consistance ontologique, mais la tâche de délimiter un espace pour l’émergence de la singularité. En situation de Retrait du fondement ontologique, il est demandé à l’ego de tenir cette place. L’ego qui n’a pas suffisamment de consistance pour s’assurer de sa propre existence se retrouve à porter celle du monde ! Et l’on s’étonne que le moderne soit tendu.
Le sage contemple l’infini. Le saint porte l’infini dans le fini. Le héros est porté par l’infini. Une espèce inédite unira les trois éveils ; on le nommera : l’Humain. Appel d’aujourd’hui.
L’initiation du héros : épreuve du viscéral, affronter charnellement le monstre féminin. Œdipe l’élude, le voici plongé dans le chaos pulsionnel. Où l’on voit que la figure de l’intellectuel se construit sur le fantasme du triomphe héroïque sans l’héroïsme. La couronne et la princesse sans l’étreinte du dragon. Maman, corps sans autre dont je suis Dieu. Mais en ce lieu précis du plus grand péril humain est la plus haute voie : Œdipe initiera Thésée. Naturellement, je ne parle ici que de la modernité.
Le moi des Modernes, plutôt que de constater son impuissance à être l’origine de son propre bonheur, préfère mettre son bonheur dans le fait d’être l’origine de soi.
Le savoir construit un monde qui n’a pas de sens, s’accordant parfaitement avec les métaphysiques qui proposent des moyens pour en sortir. Le parfait Postmoderne est confortablement scientifique et bouddhiste.
AGIR LIBRE
Tout est possible — pour autant que l’on s’engage en non-retour dans ce qui dépasse notre propre puissance.
Tout ce qui n’est pas le sentir de l’instant est illusion. Ce sentir est étranger à toute phrase. Mais de la coïncidence aux métamorphoses de la chair vivante peuvent naître des actes qui, n’étant engendrés que de l’instant pour l’instant, ne sont pas illusion. Acte-enfant, sans avenir ni passé. Certains de ces actes sont parole. Certaines de ces paroles sont écriture. Mais que les mécaniques du non sont puissantes ! Qu’il est délicat de démêler la simple douleur d’être de tous les refus qui la rendent insupportable !
Quelle jouissance dans un vrai oui à l’espace chaotique que l’on est !
Qu’est-ce que je gagne à devenir libre ? Ne plus jamais demander « qu’est-ce que je gagne ? »…
Agir est facile ou impossible. Seul faire est difficile.
Il n’y a pas de problème, parce qu’il n’y a pas de solution.
La graine devient un arbre, qui engendre des milliers de graines… La vraie puissance engendre des effets qui croissent avec le temps. La puissance illusoire est celle qui se retourne avec le temps. Lénine, Hitler… Il faut d’autant plus de temps que l’illusion est plus profonde. Le pouvoir de la techno-science : une longue illusion. Mais son retournement est proche.
Seul ce qui n’a pas de cause est digne d’un regard humain.
La seule décision créatrice : renoncer à être puissant pour laisser être la Puissance.
Le grand art : donner une petite attention au grand et une grande au petit.
L’humilité est l’intelligence de celui qui ose. La modestie, l’orgueil de celui qui n’ose pas. L’humilité consiste à ne pas se croire l’origine de soi. On ne peut donc être humble et moderne. Un temps viendra où l’on construira des asiles pour les humbles.
Me tenir là, dans l’ouverture à ce qui cherche à se donner, dont je ne dispose pas mais qui aspire à disposer de moi si je me tiens là, disponible. Je ne peux rien, qu’être le le lieu de ce qui se peut.
Le gland ne dessine pas le plan du chêne.
Demeurer dans le cœur calme des contraires, à la croisée du monde et de la grâce, dans l’immobilité silencieuse d’où naît la parole-acte.
La vraie puissance : celle qui n’est pas la mienne mais n’est rien sans moi.
Recevoir implique une ouverture inconditionnelle, raison pour laquelle l’être humain en a horreur.
Le monde n’est que le produit de la convention des regards humains. Changer de regard change le monde. Mais puisque changer de regard, c’est mourir à soi, on préférera généralement la bonne volonté : effort pour changer le monde à l’intérieur d’un regard qui, échappant à la mise en question, le maintient en l’état.
Il n’y a pas de plus juste motivation que de n’avoir aucune raison de faire quelque chose.
Le bénéfice de donner est la puissance de donner plus encore.
Clé de l’acte juste : la présence est suffisante ; mais elle se donne seulement lorsque on ne lui ajoute rien. Et surtout pas de la bonne volonté !
« Tu » n’es capable de rien ; mais ce qui est possible à travers toi, tu le sous-estimes encore. Pas assez d’humilité pour lâcher vraiment la modestie.
Obéir, depuis une vigilance ultra-fine au sentir, à l’impulsion petite qui m’emmène où je ne sais pas. La densité du corps mue par l’infime.
Il n’est jamais le temps de décider, sinon de sentir ou de s’anesthésier.
Accepter de n’être plus que là, ouvert à cela qui m’emmène ou me laisse immobile.
Toute force issue d’une position est fausse. Chercher la position de faiblesse : c’est là que se révèle la vraie force.
Perdre consciemment le contrôle.
Le premier degré de la liberté est de souffrir de la prison qu’on est. Le second, d’en rire. Le troisième ? La prison n’a jamais existé !
Foncer d’abord et réfléchir ensuite est la seule manière de prendre conscience de l’inutilité foncière de la réflexion.
Il y a le sommeil du juste, mais aussi le sommeil du tiède. De l’un à l’autre, l’insomnie est la voie.
Saisir sa chance, c’est risquer de tout perdre.
Pour ne pas être esclave d’autrui, on devient esclave de sa révolte contre autrui. Ma liberté est au-delà du non au non d’autrui à ma liberté.
Descends dans ta faiblesse, tu trouveras ta force.
L’acte vrai nait d’une totale passivité : ni faire ni conception ni vouloir. Subjectivité hors-jeu (ce que l’ego vit comme : désespoir, dépression, mort), rien ne s’interpose entre le désir et sa matière. Juste attendre. De l’opportunité naît l’acte.
N’est au pouvoir d’un être humain que de faire coïncider sa vie avec l’idée qu’il se fait du bonheur. S’il y parvient, malheur !
Oui, le réel est bon et seul est bon le oui. Mais contre les spinozistes paresseux, il convient de rappeler qu’un monde construit sur un non au réel ne saurait être bon et qu’au nom du oui il est bon de lui dire non.
Tu ne sais pas ce que tu veux parce que, ne voulant que ce que tu sais, le réel t’effraye.
Rien ne résout rien. Fort de cette base, on peut agir.
J’appelle matière ce qui me résiste et réel ce qui me surprend.
Relie-toi à ce qui te dépasse et vis spontanément.
La chute est de faire pour, au lieu d’agir d’où l’on désire. N’avoir aucun but, car seule compte l’origine de l’acte. Son sens ne se révèle qu’ensuite et il émerveille : infiniment autre et plus que tout ce que l’on aurait pu préméditer ! Maîtriser l’acte, c’est en vivre la juste origine. Discipline : devenir le disciple du oui.
Nier mes déterminations aussi bien que m’identifier à elles, c’est me laisser déterminer par elles, c’est en faire un déterminisme. La seule manière que les déterminations de mon existence ne dégénèrent pas en déterminisme est de les ressourcer sans cesse dans la dimension vierge de mon être. Unique liberté concrète.
L’épreuve me paraît au-dessus de mes forces parce qu’elle fait appel à des forces en moi que je ne connais pas encore.
Par la grâce de mon non-agir, spontanément, se produit tout ce que j’aurais voulu produire et bien davantage. Et j’apprends mon désir de l’émergence des choses.
Tout ce qui n’est pas le sentir de l’instant est illusion. Ce sentir est étranger à toute phrase. Mais de la coïncidence aux métamorphoses de la chair vivante peuvent naître des actes qui, n’étant engendrés que de l’instant pour l’instant, ne sont pas illusion. Acte-enfant, sans avenir ni passé. Certains de ces actes sont parole. Certaines de ces paroles sont écriture. Mais que les mécaniques du non sont puissantes ! Qu’il est délicat de démêler la simple douleur d’être de tous les refus qui la rendent insupportable !
Quelle jouissance dans un vrai oui à l’espace chaotique que l’on est !
Qu’est-ce que je gagne à devenir libre ? Ne plus jamais demander « qu’est-ce que je gagne ? »…
Agir est facile ou impossible. Seul faire est difficile.
Il n’y a pas de problème, parce qu’il n’y a pas de solution.
La graine devient un arbre, qui engendre des milliers de graines… La vraie puissance engendre des effets qui croissent avec le temps. La puissance illusoire est celle qui se retourne avec le temps. Lénine, Hitler… Il faut d’autant plus de temps que l’illusion est plus profonde. Le pouvoir de la techno-science : une longue illusion. Mais son retournement est proche.
Seul ce qui n’a pas de cause est digne d’un regard humain.
La seule décision créatrice : renoncer à être puissant pour laisser être la Puissance.
Le grand art : donner une petite attention au grand et une grande au petit.
L’humilité est l’intelligence de celui qui ose. La modestie, l’orgueil de celui qui n’ose pas. L’humilité consiste à ne pas se croire l’origine de soi. On ne peut donc être humble et moderne. Un temps viendra où l’on construira des asiles pour les humbles.
Me tenir là, dans l’ouverture à ce qui cherche à se donner, dont je ne dispose pas mais qui aspire à disposer de moi si je me tiens là, disponible. Je ne peux rien, qu’être le le lieu de ce qui se peut.
Le gland ne dessine pas le plan du chêne.
Demeurer dans le cœur calme des contraires, à la croisée du monde et de la grâce, dans l’immobilité silencieuse d’où naît la parole-acte.
La vraie puissance : celle qui n’est pas la mienne mais n’est rien sans moi.
Recevoir implique une ouverture inconditionnelle, raison pour laquelle l’être humain en a horreur.
Le monde n’est que le produit de la convention des regards humains. Changer de regard change le monde. Mais puisque changer de regard, c’est mourir à soi, on préférera généralement la bonne volonté : effort pour changer le monde à l’intérieur d’un regard qui, échappant à la mise en question, le maintient en l’état.
Il n’y a pas de plus juste motivation que de n’avoir aucune raison de faire quelque chose.
Le bénéfice de donner est la puissance de donner plus encore.
Clé de l’acte juste : la présence est suffisante ; mais elle se donne seulement lorsque on ne lui ajoute rien. Et surtout pas de la bonne volonté !
« Tu » n’es capable de rien ; mais ce qui est possible à travers toi, tu le sous-estimes encore. Pas assez d’humilité pour lâcher vraiment la modestie.
Obéir, depuis une vigilance ultra-fine au sentir, à l’impulsion petite qui m’emmène où je ne sais pas. La densité du corps mue par l’infime.
Il n’est jamais le temps de décider, sinon de sentir ou de s’anesthésier.
Accepter de n’être plus que là, ouvert à cela qui m’emmène ou me laisse immobile.
Toute force issue d’une position est fausse. Chercher la position de faiblesse : c’est là que se révèle la vraie force.
Perdre consciemment le contrôle.
Le premier degré de la liberté est de souffrir de la prison qu’on est. Le second, d’en rire. Le troisième ? La prison n’a jamais existé !
Foncer d’abord et réfléchir ensuite est la seule manière de prendre conscience de l’inutilité foncière de la réflexion.
Il y a le sommeil du juste, mais aussi le sommeil du tiède. De l’un à l’autre, l’insomnie est la voie.
Saisir sa chance, c’est risquer de tout perdre.
Pour ne pas être esclave d’autrui, on devient esclave de sa révolte contre autrui. Ma liberté est au-delà du non au non d’autrui à ma liberté.
Descends dans ta faiblesse, tu trouveras ta force.
L’acte vrai nait d’une totale passivité : ni faire ni conception ni vouloir. Subjectivité hors-jeu (ce que l’ego vit comme : désespoir, dépression, mort), rien ne s’interpose entre le désir et sa matière. Juste attendre. De l’opportunité naît l’acte.
N’est au pouvoir d’un être humain que de faire coïncider sa vie avec l’idée qu’il se fait du bonheur. S’il y parvient, malheur !
Oui, le réel est bon et seul est bon le oui. Mais contre les spinozistes paresseux, il convient de rappeler qu’un monde construit sur un non au réel ne saurait être bon et qu’au nom du oui il est bon de lui dire non.
Tu ne sais pas ce que tu veux parce que, ne voulant que ce que tu sais, le réel t’effraye.
Rien ne résout rien. Fort de cette base, on peut agir.
J’appelle matière ce qui me résiste et réel ce qui me surprend.
Relie-toi à ce qui te dépasse et vis spontanément.
La chute est de faire pour, au lieu d’agir d’où l’on désire. N’avoir aucun but, car seule compte l’origine de l’acte. Son sens ne se révèle qu’ensuite et il émerveille : infiniment autre et plus que tout ce que l’on aurait pu préméditer ! Maîtriser l’acte, c’est en vivre la juste origine. Discipline : devenir le disciple du oui.
Nier mes déterminations aussi bien que m’identifier à elles, c’est me laisser déterminer par elles, c’est en faire un déterminisme. La seule manière que les déterminations de mon existence ne dégénèrent pas en déterminisme est de les ressourcer sans cesse dans la dimension vierge de mon être. Unique liberté concrète.
L’épreuve me paraît au-dessus de mes forces parce qu’elle fait appel à des forces en moi que je ne connais pas encore.
Par la grâce de mon non-agir, spontanément, se produit tout ce que j’aurais voulu produire et bien davantage. Et j’apprends mon désir de l’émergence des choses.
BIEN, MAL ET PAR-DELÀ
Pour celui qui, très en deçà du bien et du mal, a l’outrecuidance de se penser au-delà, la plus étriquée des morale serait un grand progrès.
On ne demande d’être altruiste qu’à ceux dont on doute de la capacité d’aimer. Celui qui sait aimer a un devoir d’égoïsme, même et surtout, car c’est le plus difficile, avant que sa capacité d’aimer ne soit visible.
Toute l’éthique tient en ceci : c’est moi qui souffre, donc c’est moi qui peut.
Enfin, une éthique simple : Tout acte prémédité est faux. Tout acte justifiable est faux.
Le juste orgueil est celui qui t’oblige.
La moralité a pour tâche nécessaire d’inquiéter la pulsion. Mais pour se libérer de cette dernière, il convient de se situer au-delà de la moralité.
La passion du sadique est sa propre indifférence.
Ce qui fait le lâche ou le héros est la réaction d’un homme face à ce qu’il n’a choisi ni voulu. Le moderne est inapte à l’héroïsme non par lâcheté mais parce qu’il aspire à tout avoir choisi. S’ouvrir à la simple possibilité d’être lâche serait pour lui un pas de géant vers l’humanité.
L’homme est responsable de l’instant présent, rien d’autre. Mais c’est tout.
On ne demande d’être altruiste qu’à ceux dont on doute de la capacité d’aimer. Celui qui sait aimer a un devoir d’égoïsme, même et surtout, car c’est le plus difficile, avant que sa capacité d’aimer ne soit visible.
Toute l’éthique tient en ceci : c’est moi qui souffre, donc c’est moi qui peut.
Enfin, une éthique simple : Tout acte prémédité est faux. Tout acte justifiable est faux.
Le juste orgueil est celui qui t’oblige.
La moralité a pour tâche nécessaire d’inquiéter la pulsion. Mais pour se libérer de cette dernière, il convient de se situer au-delà de la moralité.
La passion du sadique est sa propre indifférence.
Ce qui fait le lâche ou le héros est la réaction d’un homme face à ce qu’il n’a choisi ni voulu. Le moderne est inapte à l’héroïsme non par lâcheté mais parce qu’il aspire à tout avoir choisi. S’ouvrir à la simple possibilité d’être lâche serait pour lui un pas de géant vers l’humanité.
L’homme est responsable de l’instant présent, rien d’autre. Mais c’est tout.
POLITIQUE ET VIVRE ENSEMBLE
La démocratie n’est viable que pour un peuple de rois.
Être parent, c’est être le passé d’un autre.
Devenir un maître des résonances, en se reliant consciemment au meilleur de l’autre. C’est-à-dire à sa vérité, au tout-autre qu’il est, source d’un incessant renouveau. Cela implique de lâcher tout savoir, afin d’entrer dans l’intuition de l’unique. Certaines personnes sont entourées de gens qui ne font qu’appeler le pire en elles. Et il est confortable, pour un groupe, de disposer d’un être au compte duquel chacun peut placer l’exécrable de lui-même. Bouc émissaire… Pharmakos… Tout ce que l’on reproche à un autre, on le porte en soi. C’est en cela, aussi, que nous sommes un. Le maître des résonances est un artiste dont la matière est l’humain. Il y crée la beauté.
Face au pire de l’autre : ne pas relever, ne pas rejeter, offrir un accueil qui ne donne pas de prise. Alors, de lui-même, il lâche. Et de l’autre se propose. Non susciter le meilleur, quelle prétention ! Mais n’offrir au pire aucune résonance. Il suffit ne rien défendre.
« Toi » qui attends de moi que je comble ton manque, nous ne sommes pas contemporains : « tu » appartiens à l’histoire passée de cet autre, ce Tu qui me fait face et que « tu » aspires à dominer au point qu’il soit identifié à « toi » ; il m’est donc impossible d’entrer avec « toi » dans une relation de fécondité. Mais dès que j’entre avec cet autre dans une relation de fécondité, alors je suis aussi en rapport avec toi qui, bien que n’étant plus cet autre qui est présent, est toujours présent en lui. Tu ne peux rien me demander. Mais je peux t’aimer. Même te parler. Petit enfant. Écoute : Cet autre seul, présent en face de moi, peut t’offrir la présence dont tu es l’imploration. Car si tu n’appartiens plus au présent du monde, tu es présent en lui. Mais s’il te laisse, identifié à toi, entrer en relation avec d’autres à sa place, il n’est plus en relation. Ni avec l’autre, ni avec toi. Car, demandant à d’autres ce qu’il est seul à pouvoir te donner, il te prive de lui-même et se prive des autres.
Le faux amour prend pouvoir sur la liberté de l’autre.
Aimer, c’est donner librement du pouvoir.
Toi, moi : distincts, seuls, mais non pas séparés. Dans le soulagement de la fusion, on nie la distinction, et cela sépare : de soi d’abord, de l’autre par suite. Mais au cœur de ta solitude et de ton silence (ils sont frère et sœur), tu rejoins le cœur de mon silence et de ma solitude. Parce que je suis, parce que tu es, nous sommes.
Mystère de soi et mystère de l’autre sont un même désir.
Il existe en chacun de nous une ribambelle de petits enfants innocents vivant dans un monde de jouets. Préserver leur innocence, mais dans la conscience de l’autre humain : défi de la maturité.
Simplicité : prendre l’autre au pied de la lettre et dire seulement ce que l’on sent.
Mes amis : je donne, et n’attends rien. Mais je ne donne pas pour eux. Je donne pour que la Vie donne à travers eux. Mes amis sont ceux en qui j’ai vu, donc aimé, la singularité d’un don possible au monde.
Donner à soi comme à un autre : ni plus, ni moins. Mais en numéro un. Non par préférence, mais parce que donner demande davantage que recevoir.
On voit l’enfant pervers parce qu’on refuse son animalité ; il devient pervers à cause de ce refus même. Adulte, cadavre de l’enfant.
Adulte n’est souvent que le nom donné à la cuirasse qu’a dû revêtir l’enfant pour ne pas mourir ou devenir fou. On ne frappe jamais que pour protéger l’enfant que l’on est sous la cuirasse, de la cuirasse qui couvre un autre enfant. Tout le monde se défend.
La confiance est la folie de l’amour.
Est esclave du pouvoir qui préfère obtenir plutôt que recevoir.
L’amour que tu mendies hors de toi réside au plus intime de toi et tu ne l’éprouveras qu’en le donnant.
S’aimer, c’est aimer ensemble.
Si je suis tout pour toi, c’est que tu n’es rien sans moi. Comment ce rien serait-il objet de mon désir ?
On ne peut être maître de sa vie qu’en étant absolument seul, ou maître de la vie des autres.
N’est heureux sans créer le malheur que l’être courageux.
Dire « tu », c’est renoncer à être l’origine d’un autre qui, comme moi, n’est pas l’origine de lui-même ; toute relation vraie entre je et tu questionne en direction d’un mystère, celui de notre commune origine. Ce questionnement partagé est l’espace de la fraternité.
Combien de temps devrai-je te fréquenter pour, cessant de te connaître, enfin te rencontrer ?
Être parent, c’est être le passé d’un autre.
Devenir un maître des résonances, en se reliant consciemment au meilleur de l’autre. C’est-à-dire à sa vérité, au tout-autre qu’il est, source d’un incessant renouveau. Cela implique de lâcher tout savoir, afin d’entrer dans l’intuition de l’unique. Certaines personnes sont entourées de gens qui ne font qu’appeler le pire en elles. Et il est confortable, pour un groupe, de disposer d’un être au compte duquel chacun peut placer l’exécrable de lui-même. Bouc émissaire… Pharmakos… Tout ce que l’on reproche à un autre, on le porte en soi. C’est en cela, aussi, que nous sommes un. Le maître des résonances est un artiste dont la matière est l’humain. Il y crée la beauté.
Face au pire de l’autre : ne pas relever, ne pas rejeter, offrir un accueil qui ne donne pas de prise. Alors, de lui-même, il lâche. Et de l’autre se propose. Non susciter le meilleur, quelle prétention ! Mais n’offrir au pire aucune résonance. Il suffit ne rien défendre.
« Toi » qui attends de moi que je comble ton manque, nous ne sommes pas contemporains : « tu » appartiens à l’histoire passée de cet autre, ce Tu qui me fait face et que « tu » aspires à dominer au point qu’il soit identifié à « toi » ; il m’est donc impossible d’entrer avec « toi » dans une relation de fécondité. Mais dès que j’entre avec cet autre dans une relation de fécondité, alors je suis aussi en rapport avec toi qui, bien que n’étant plus cet autre qui est présent, est toujours présent en lui. Tu ne peux rien me demander. Mais je peux t’aimer. Même te parler. Petit enfant. Écoute : Cet autre seul, présent en face de moi, peut t’offrir la présence dont tu es l’imploration. Car si tu n’appartiens plus au présent du monde, tu es présent en lui. Mais s’il te laisse, identifié à toi, entrer en relation avec d’autres à sa place, il n’est plus en relation. Ni avec l’autre, ni avec toi. Car, demandant à d’autres ce qu’il est seul à pouvoir te donner, il te prive de lui-même et se prive des autres.
Le faux amour prend pouvoir sur la liberté de l’autre.
Aimer, c’est donner librement du pouvoir.
Toi, moi : distincts, seuls, mais non pas séparés. Dans le soulagement de la fusion, on nie la distinction, et cela sépare : de soi d’abord, de l’autre par suite. Mais au cœur de ta solitude et de ton silence (ils sont frère et sœur), tu rejoins le cœur de mon silence et de ma solitude. Parce que je suis, parce que tu es, nous sommes.
Mystère de soi et mystère de l’autre sont un même désir.
Il existe en chacun de nous une ribambelle de petits enfants innocents vivant dans un monde de jouets. Préserver leur innocence, mais dans la conscience de l’autre humain : défi de la maturité.
Simplicité : prendre l’autre au pied de la lettre et dire seulement ce que l’on sent.
Mes amis : je donne, et n’attends rien. Mais je ne donne pas pour eux. Je donne pour que la Vie donne à travers eux. Mes amis sont ceux en qui j’ai vu, donc aimé, la singularité d’un don possible au monde.
Donner à soi comme à un autre : ni plus, ni moins. Mais en numéro un. Non par préférence, mais parce que donner demande davantage que recevoir.
On voit l’enfant pervers parce qu’on refuse son animalité ; il devient pervers à cause de ce refus même. Adulte, cadavre de l’enfant.
Adulte n’est souvent que le nom donné à la cuirasse qu’a dû revêtir l’enfant pour ne pas mourir ou devenir fou. On ne frappe jamais que pour protéger l’enfant que l’on est sous la cuirasse, de la cuirasse qui couvre un autre enfant. Tout le monde se défend.
La confiance est la folie de l’amour.
Est esclave du pouvoir qui préfère obtenir plutôt que recevoir.
L’amour que tu mendies hors de toi réside au plus intime de toi et tu ne l’éprouveras qu’en le donnant.
S’aimer, c’est aimer ensemble.
Si je suis tout pour toi, c’est que tu n’es rien sans moi. Comment ce rien serait-il objet de mon désir ?
On ne peut être maître de sa vie qu’en étant absolument seul, ou maître de la vie des autres.
N’est heureux sans créer le malheur que l’être courageux.
Dire « tu », c’est renoncer à être l’origine d’un autre qui, comme moi, n’est pas l’origine de lui-même ; toute relation vraie entre je et tu questionne en direction d’un mystère, celui de notre commune origine. Ce questionnement partagé est l’espace de la fraternité.
Combien de temps devrai-je te fréquenter pour, cessant de te connaître, enfin te rencontrer ?
CORPS
Observer sans relâche ceci : le mental a pris possession du corps entier ! Adieu la simplicité clairvoyante de l’instinct. Notre chair de Modernes est le lieu d’une indéfinité de micro-pulsions qui sont autant de raidissements contre le sentir. Extraordinaire sophistication stupide de la pulsion, tension vers le soulagement… de la tension !
De cette prison, on ne sort que par le haut.
Être témoin des stratégies du mental engrammées dans les mouvements du corps, pour m’arracher à son présent.
La chair, c’est la rencontre.
Sentir n’est pas s’occuper de soi ! Cette grisaille, restreindre ma conscience aux sensations qui recèlent un potentiel de souffrance ou de soulagement ! Infime partie du flux sensoriel qui me traverse — mais m’obsédant ordinairement. Le foisonnement gratuit des sensations sans enjeu : là est la grâce, elle ne cesse de se donner. Et moi, nez dans l’enjeu !
Trouver l’amour non dans l’affectif, qui n’est que le mental fuyant le sentir dans des attachements et des projections, non dans le corps-objet (construit par le mental à partir de la croisée des regards) — mais dans la chair : espace vide disponible-ouvert à l’inlassable traversée du tout-autre, pur frémissement du désir.
Comme le moi est étranger au corps !
Donner lieu, dans l’espace que l’on est, à ce que l’on n’est pas : la véritable incarnation.
Placer l’intensité du corps vivant dans la verticalité de l’Esprit : l’âme ne doit servir qu’à cela. Le psycho-affectif a vocation de s’éteindre.
Être le lieu de la rencontre amoureuse de deux principes antagonistes comme le Saint Esprit et la Sainte Matière implique la souffrance. Refuser la souffrance, c’est s’empêcher d’être ce lieu. Et les noces n’ont pas lieu. C’est pourquoi il n’est qu’un seul principe : se détendre et souffrir. Alors, la souffrance se révèle comme l’apparence première et illusoire de tout autre chose — que l’on ne peut toucher qu’en vivant la souffrance qui la fait apparaître. La vérité du Corps.
Sentir annule le karma, unissant l’acte et la perception de ses fruits. L’acte étant un avec son jugement, disparaît l’espace de la faute. Sentir annule la loi. Sentir est hors-la-loi.
Confier une question au corps. Le mental oublie. La réponse vient.
Le corps est présent, et le présent est hors du temps. La présence transcende le temps. Sentir est voie de la présence. Être-le-là de l’être, dit Heidegger en une formule dont il n’a pas pressenti, encore moins vécu, la radicalité révolutionnaire, copernicienne : un dé-centrement-recentrement. Être la présence, l’espace où se déploie l’apparition-disparition des phénomènes — le temps. Être l’espace-présence où se déploie le temps (comme il faut tordre, déplier le langage, formaté par la vision du sub-jectum, pour approcher cela !)
Corps-perception, corps-espace, corps-présence… Tout est phénomène ! Où suis-je, moi, qui me prétend support des phénomènes ? Et : qu’est-ce qui n’est pas le corps ?
Le récit, de n’être plus objet d’adhésion, peu à peu se tarit. Alors, plus rien ne me protège de mes peurs. Plus rien ne m’en sépare. Je peux les épouser. Elles ne sont « peurs » qu’à cause de ma séparation d’avec elles. En vérité, elles sont CORPS. Faire corps avec elles. Je ne peux faire corps qu’avec tout.
Faire CORPS de toute chose.
Le corps est l’être-traversé ; la chair est le lieu de l’autre. Ce qui est si drôle et si tragique, c’est qu’on prend pour le corps ce qui est en réalité refus de l’être-traversé, contraction, densité — non à la vie fait chose. Au point que si l’on se détend vraiment, terreur de n’être plus rien. Au moment même où l’on se fait le lieu de tout !
Chaque sujet mène une guerre contre l’événementialité du corps.
Dionysos est le dieu de l’anti-mental, puisqu’il est celui de la dis-solution. Se dissoudre n’est fécond que s’il y a un axe vertical et un axe horizontal. Une Croix. Dionysos est serviteur du Christ. Se dissoudre : devenir pur espace ouvert. Mais ouvert à quoi ? Dans quelle orientation ? Voilà pourquoi l’axe est nécessaire. Juste orientation verticale : l’Autre ; juste orientation horizontale : l’autre. L’opposé de Dionysos : tenir. Tenir à soi. Tenir à quelqu’un. Dé-tenir, re-tenir, con-tenir. Dionysos : lâcher. Lâcher prise. Se lâcher. Laisser advenir. Dionysos est le dieu du corps, car le corps est le lieu de l’advenir. Et comme le sujet est guerre contre l’événementialité du corps, il est le dieu de l’ef-fondrement conscient du sub-jectum. Il est le dieu de mon désir, qui appelle la dissolution de cela qui remplit l’espace que je suis — « moi ».
Le corps est l’espace du manque, le lieu où cela dont il est manqué se dé-couvre en creux. Que rien ne peut combler le manque est une découverte incessante, qui a pour nom l’instant présent et pour forme la dé-pression. Ainsi s’avère-t-il charnellement que le manque est une connaissance, et cette connaissance une relation : entre Un qui ose l’absence et l’autre le manque. Essence de l’amour. Oser découvrir, dans la présence au manque, Celui qui ose l’absence à Soi.
Le manque, rien ne le comblera jamais dans la dimension horizontale — le monde. Que tous mes rêves d’aujourd’hui se réalisent, il sera toujours là, à se fixer sur de nouveaux objets de cet archaïque et immortel appétit qui est refus de la condition charnelle. La chair est appel vertical. Faire le deuil de l’imaginaire horizontal est la condition pour éprouver, dans la verticalité, l’appel en tant qu’il donne. Que donne l’appel comme essence du sentir ? Cela (Celui ?) auquel il en est appelé. Non comme comblement — cela serait transfert dans la verticalité de l’intérêt trivial pour le monde (un tel déplacement est « spiritualité »). Mais comme l’Absent, le Retiré, qui n’est connu qu’en tant qu’il en est manqué. Explorer le manque. Telle est l’œuvre du désir. Car le manque est toute-altérité, en même temps que le lieu de toute altérité. Le manque est chair. Pas de plus haute ni de plus terrible jouissance.
La chair est appel. L’appel implique la connaissance de ce qui est appelé. Il en implique aussi l’absence. Il en implique encore, mystérieusement, la présence (sans quoi il ne serait appel à rien). Désespérer de combler le manque, en même temps que la prise de conscience que le goût aux propositions de ce monde-ci n’est que compulsion à ne plus sentir, rend possible l’épreuve du manque comme connaissance paradoxale du non-donné, du dérobé, du présent-dans-l’absence. Il n’est plus possible de connaître Dieu comme fondement, sinon dans la crédulité ou le fanatisme. Mais il est possible de le connaître dans l’œuvre de son retrait.
Le lieu de cette œuvre est la chair.
La pulsion est une mécanique qui accroche des espoirs de soulagement à des possibilités du monde. Même issu du désir, l’acte est alors récupéré. Le soulagement nie la chair qui sent et coupe l’acte du mouvement de la vie. Il est nécessaire à la vie que l’appui soit dérobé. Dans le désastre pulsionnel se révèle l’expérience existentielle contre laquelle se construit la mécanique, et qui est le cœur même de l’humain : la chair comme pur sentir, union de corps et de conscience et, partant, lieu d’un différentiel d’intensité qui se donne de prime abord comme douleur d’être. Coïncider avec cette douleur d’être est cela seul qui accomplit l’unité de cette union. Cette unité est joie pure. La joie n’est vécue que dans l’arrêt de toute mécanique. Il y faut souvent la panne ou l’accident. Gare alors si la conscience, afin d’échapper au corps, s’est identifiée à la mécanique ! La modernité est le règne des consciences machinales. Le devenir-chair collectif appelle de vastes accidents… M’accidenter avec gratitude. Le moment suivant la collision est une merveilleuse possibilité de silence. Et peu à peu, ne plus alimenter cette machine : elle ne carbure qu’à l’adhésion. Aimer, c’est mettre en panne les mécaniques. Tout amour est charnel.
Le corps donne l’âme.
Il vient un temps où l’on peut sentir en soi un glaive qui tranche cela qui souffre, et qui n’est qu’ego. Ce n’est pas soulagement. C’est, une fois acceptée totalement l’intensité, désir se séparant de ce souffrir qui l’encombre. Ce qui souffre est négation. Le désir, pur affirmation, se libère du non-désir. Le corps vivant n’a pas besoin de ce que la pensée projette. Il a très peu de véritables besoins, et infiniment de vrai désir. Le corps n’a rien à faire de cette mécanique mentale affamée qui le tord, l’opprime et le dévore dès que le réel ne lui donne pas selon son insatiable appétit. Le corps n’a rien à faire du manque rageur et souffreteux. Dès qu’il le peut, il s’en débarrasse. Quand le peut-il ? Dès que l’accent n’est plus mis sur l’absent, mais sur le présent. Présent du corps-sentant.
Aller nu exige le temps du dénuement : le présent, pur dénuement.
L’ultime espérance des temps tièdes : croire en l’insurrection de la chair.
N’oublie jamais que tu es nu sous tes habits.
Donner son con-sentement à la chair : sentir est un oui de chaque instant.
Une chair s’acceptant absolument dans sa souffrance du manque de Dieu devient vierge espace, pure aspiration au Souffle créateur sans un reste pour se dérober au Don d’en haut. Avènement de l’Humain. Le corps est le lieu de la mort de Dieu. Le corps est le lieu du Dés-astre. La pulsion est refus du désastre. Du désastre pulsionnel naît l’acceptation, de l’acceptation naît le Désir. Du Désir naît… Le Corps.
Être témoin des stratégies du mental engrammées dans les mouvements du corps, pour m’arracher à son présent.
La chair, c’est la rencontre.
Sentir n’est pas s’occuper de soi ! Cette grisaille, restreindre ma conscience aux sensations qui recèlent un potentiel de souffrance ou de soulagement ! Infime partie du flux sensoriel qui me traverse — mais m’obsédant ordinairement. Le foisonnement gratuit des sensations sans enjeu : là est la grâce, elle ne cesse de se donner. Et moi, nez dans l’enjeu !
Trouver l’amour non dans l’affectif, qui n’est que le mental fuyant le sentir dans des attachements et des projections, non dans le corps-objet (construit par le mental à partir de la croisée des regards) — mais dans la chair : espace vide disponible-ouvert à l’inlassable traversée du tout-autre, pur frémissement du désir.
Comme le moi est étranger au corps !
Donner lieu, dans l’espace que l’on est, à ce que l’on n’est pas : la véritable incarnation.
Placer l’intensité du corps vivant dans la verticalité de l’Esprit : l’âme ne doit servir qu’à cela. Le psycho-affectif a vocation de s’éteindre.
Être le lieu de la rencontre amoureuse de deux principes antagonistes comme le Saint Esprit et la Sainte Matière implique la souffrance. Refuser la souffrance, c’est s’empêcher d’être ce lieu. Et les noces n’ont pas lieu. C’est pourquoi il n’est qu’un seul principe : se détendre et souffrir. Alors, la souffrance se révèle comme l’apparence première et illusoire de tout autre chose — que l’on ne peut toucher qu’en vivant la souffrance qui la fait apparaître. La vérité du Corps.
Sentir annule le karma, unissant l’acte et la perception de ses fruits. L’acte étant un avec son jugement, disparaît l’espace de la faute. Sentir annule la loi. Sentir est hors-la-loi.
Confier une question au corps. Le mental oublie. La réponse vient.
Le corps est présent, et le présent est hors du temps. La présence transcende le temps. Sentir est voie de la présence. Être-le-là de l’être, dit Heidegger en une formule dont il n’a pas pressenti, encore moins vécu, la radicalité révolutionnaire, copernicienne : un dé-centrement-recentrement. Être la présence, l’espace où se déploie l’apparition-disparition des phénomènes — le temps. Être l’espace-présence où se déploie le temps (comme il faut tordre, déplier le langage, formaté par la vision du sub-jectum, pour approcher cela !)
Corps-perception, corps-espace, corps-présence… Tout est phénomène ! Où suis-je, moi, qui me prétend support des phénomènes ? Et : qu’est-ce qui n’est pas le corps ?
Le récit, de n’être plus objet d’adhésion, peu à peu se tarit. Alors, plus rien ne me protège de mes peurs. Plus rien ne m’en sépare. Je peux les épouser. Elles ne sont « peurs » qu’à cause de ma séparation d’avec elles. En vérité, elles sont CORPS. Faire corps avec elles. Je ne peux faire corps qu’avec tout.
Faire CORPS de toute chose.
Le corps est l’être-traversé ; la chair est le lieu de l’autre. Ce qui est si drôle et si tragique, c’est qu’on prend pour le corps ce qui est en réalité refus de l’être-traversé, contraction, densité — non à la vie fait chose. Au point que si l’on se détend vraiment, terreur de n’être plus rien. Au moment même où l’on se fait le lieu de tout !
Chaque sujet mène une guerre contre l’événementialité du corps.
Dionysos est le dieu de l’anti-mental, puisqu’il est celui de la dis-solution. Se dissoudre n’est fécond que s’il y a un axe vertical et un axe horizontal. Une Croix. Dionysos est serviteur du Christ. Se dissoudre : devenir pur espace ouvert. Mais ouvert à quoi ? Dans quelle orientation ? Voilà pourquoi l’axe est nécessaire. Juste orientation verticale : l’Autre ; juste orientation horizontale : l’autre. L’opposé de Dionysos : tenir. Tenir à soi. Tenir à quelqu’un. Dé-tenir, re-tenir, con-tenir. Dionysos : lâcher. Lâcher prise. Se lâcher. Laisser advenir. Dionysos est le dieu du corps, car le corps est le lieu de l’advenir. Et comme le sujet est guerre contre l’événementialité du corps, il est le dieu de l’ef-fondrement conscient du sub-jectum. Il est le dieu de mon désir, qui appelle la dissolution de cela qui remplit l’espace que je suis — « moi ».
Le corps est l’espace du manque, le lieu où cela dont il est manqué se dé-couvre en creux. Que rien ne peut combler le manque est une découverte incessante, qui a pour nom l’instant présent et pour forme la dé-pression. Ainsi s’avère-t-il charnellement que le manque est une connaissance, et cette connaissance une relation : entre Un qui ose l’absence et l’autre le manque. Essence de l’amour. Oser découvrir, dans la présence au manque, Celui qui ose l’absence à Soi.
Le manque, rien ne le comblera jamais dans la dimension horizontale — le monde. Que tous mes rêves d’aujourd’hui se réalisent, il sera toujours là, à se fixer sur de nouveaux objets de cet archaïque et immortel appétit qui est refus de la condition charnelle. La chair est appel vertical. Faire le deuil de l’imaginaire horizontal est la condition pour éprouver, dans la verticalité, l’appel en tant qu’il donne. Que donne l’appel comme essence du sentir ? Cela (Celui ?) auquel il en est appelé. Non comme comblement — cela serait transfert dans la verticalité de l’intérêt trivial pour le monde (un tel déplacement est « spiritualité »). Mais comme l’Absent, le Retiré, qui n’est connu qu’en tant qu’il en est manqué. Explorer le manque. Telle est l’œuvre du désir. Car le manque est toute-altérité, en même temps que le lieu de toute altérité. Le manque est chair. Pas de plus haute ni de plus terrible jouissance.
La chair est appel. L’appel implique la connaissance de ce qui est appelé. Il en implique aussi l’absence. Il en implique encore, mystérieusement, la présence (sans quoi il ne serait appel à rien). Désespérer de combler le manque, en même temps que la prise de conscience que le goût aux propositions de ce monde-ci n’est que compulsion à ne plus sentir, rend possible l’épreuve du manque comme connaissance paradoxale du non-donné, du dérobé, du présent-dans-l’absence. Il n’est plus possible de connaître Dieu comme fondement, sinon dans la crédulité ou le fanatisme. Mais il est possible de le connaître dans l’œuvre de son retrait.
Le lieu de cette œuvre est la chair.
La pulsion est une mécanique qui accroche des espoirs de soulagement à des possibilités du monde. Même issu du désir, l’acte est alors récupéré. Le soulagement nie la chair qui sent et coupe l’acte du mouvement de la vie. Il est nécessaire à la vie que l’appui soit dérobé. Dans le désastre pulsionnel se révèle l’expérience existentielle contre laquelle se construit la mécanique, et qui est le cœur même de l’humain : la chair comme pur sentir, union de corps et de conscience et, partant, lieu d’un différentiel d’intensité qui se donne de prime abord comme douleur d’être. Coïncider avec cette douleur d’être est cela seul qui accomplit l’unité de cette union. Cette unité est joie pure. La joie n’est vécue que dans l’arrêt de toute mécanique. Il y faut souvent la panne ou l’accident. Gare alors si la conscience, afin d’échapper au corps, s’est identifiée à la mécanique ! La modernité est le règne des consciences machinales. Le devenir-chair collectif appelle de vastes accidents… M’accidenter avec gratitude. Le moment suivant la collision est une merveilleuse possibilité de silence. Et peu à peu, ne plus alimenter cette machine : elle ne carbure qu’à l’adhésion. Aimer, c’est mettre en panne les mécaniques. Tout amour est charnel.
Le corps donne l’âme.
Il vient un temps où l’on peut sentir en soi un glaive qui tranche cela qui souffre, et qui n’est qu’ego. Ce n’est pas soulagement. C’est, une fois acceptée totalement l’intensité, désir se séparant de ce souffrir qui l’encombre. Ce qui souffre est négation. Le désir, pur affirmation, se libère du non-désir. Le corps vivant n’a pas besoin de ce que la pensée projette. Il a très peu de véritables besoins, et infiniment de vrai désir. Le corps n’a rien à faire de cette mécanique mentale affamée qui le tord, l’opprime et le dévore dès que le réel ne lui donne pas selon son insatiable appétit. Le corps n’a rien à faire du manque rageur et souffreteux. Dès qu’il le peut, il s’en débarrasse. Quand le peut-il ? Dès que l’accent n’est plus mis sur l’absent, mais sur le présent. Présent du corps-sentant.
Aller nu exige le temps du dénuement : le présent, pur dénuement.
L’ultime espérance des temps tièdes : croire en l’insurrection de la chair.
N’oublie jamais que tu es nu sous tes habits.
Donner son con-sentement à la chair : sentir est un oui de chaque instant.
Une chair s’acceptant absolument dans sa souffrance du manque de Dieu devient vierge espace, pure aspiration au Souffle créateur sans un reste pour se dérober au Don d’en haut. Avènement de l’Humain. Le corps est le lieu de la mort de Dieu. Le corps est le lieu du Dés-astre. La pulsion est refus du désastre. Du désastre pulsionnel naît l’acceptation, de l’acceptation naît le Désir. Du Désir naît… Le Corps.
DIEU ?
Le nez dans les chaussures, ils voudraient qu’on leur prouve le ciel.
L’être humain est un instrument à Souffle. Qui joue ?
L’athée intelligent essayera Dieu et perdra ses croyances ; le croyant intelligent essayera l’athéisme et trouvera Dieu.
Il y a des athées qui le sont par amour du mystère, bien plus proches de Dieu que ceux qui n’adorent qu’une idée.
Pathétique athée, ressassant sa rage du moi contre un Dieu dont il ne réitère le meurtre que pour s’assurer qu’il a bien pris sa place ! Le Dieu moderne, c’est le moi. Qui osera cet athéisme-là ?
Le premier et le seul véritable athée fut celui qui osa se vider intégralement de soi pour, ensuite, accueillir, sans rompre le lien, l’abandon de cet Autre pour lequel il avait renoncé à lui-même. Résurrection de la chair. Vocation cachée de l’humain d’aujourd’hui.
À l’extrême de son Retrait, Dieu lui-même est athée.
Dans l’abîme insondable du retrait divin, fond sans fond dont toute chose est l’écume, sous forme de souffrance espace et temps remémorent à la matière devenue chair l’infini perdu et, ainsi, l’y appellent. Devenir humain : d’un oui, donner lieu à cela. Il n’est d’autre joie. Tout le reste est impasse.
Acceptant de n’être l’origine de rien, m’ouvrir à l’origine de tout.
Les anges sont des oui de Dieu à sa propre folie : vivre l’absence à soi. Les démons ? des non. Et tout se passe en l’Humain !
Les hommes font de Dieu leur prolongement imaginaire dans l’au-delà, alors qu’ils en sont le prolongement réel ici-bas.
Je ne puis croire qu’en un Dieu impuissant, car Lui seul ne contredit pas le fait de ma puissance. Je ne puis vouloir qu’un moi impuissant, car lui seul ne contredit pas mon désir du miracle. Puissance de rendre Dieu puissant.
Les religions sont les ruses de Dieu. L’Esprit est le Saint Bandit-Joueur.
La maîtrise d’un accomplissement suppose l’aveuglement à tous les autres : d’où la diversité des voies et les conflits religieux. La paix religieuse n’est possible que depuis une vue d’ensemble. Celle de l’Accomplissement suprême.
Dieu comme tout-Autre s’ouvre inlassablement à soi en se vidant de soi pour laisser place à l’autre — et c’est ainsi qu’il est créateur, c’est ainsi qu’il est amour.
La chair est l’espace où Dieu fait l’expérience de l’altérité absolue à soi, qui est ouverture absolue à l’Autre.
Dieu n’est pas sujet. Dieu est sans fond. En acceptant le retrait du fondement, en vivant l’effondrement, l’homme à l’image de Dieu devient à sa ressemblance.
Dieu est un artiste qui crée des artistes.
L’être humain est un instrument à Souffle. Qui joue ?
L’athée intelligent essayera Dieu et perdra ses croyances ; le croyant intelligent essayera l’athéisme et trouvera Dieu.
Il y a des athées qui le sont par amour du mystère, bien plus proches de Dieu que ceux qui n’adorent qu’une idée.
Pathétique athée, ressassant sa rage du moi contre un Dieu dont il ne réitère le meurtre que pour s’assurer qu’il a bien pris sa place ! Le Dieu moderne, c’est le moi. Qui osera cet athéisme-là ?
Le premier et le seul véritable athée fut celui qui osa se vider intégralement de soi pour, ensuite, accueillir, sans rompre le lien, l’abandon de cet Autre pour lequel il avait renoncé à lui-même. Résurrection de la chair. Vocation cachée de l’humain d’aujourd’hui.
À l’extrême de son Retrait, Dieu lui-même est athée.
Dans l’abîme insondable du retrait divin, fond sans fond dont toute chose est l’écume, sous forme de souffrance espace et temps remémorent à la matière devenue chair l’infini perdu et, ainsi, l’y appellent. Devenir humain : d’un oui, donner lieu à cela. Il n’est d’autre joie. Tout le reste est impasse.
Acceptant de n’être l’origine de rien, m’ouvrir à l’origine de tout.
Les anges sont des oui de Dieu à sa propre folie : vivre l’absence à soi. Les démons ? des non. Et tout se passe en l’Humain !
Les hommes font de Dieu leur prolongement imaginaire dans l’au-delà, alors qu’ils en sont le prolongement réel ici-bas.
Je ne puis croire qu’en un Dieu impuissant, car Lui seul ne contredit pas le fait de ma puissance. Je ne puis vouloir qu’un moi impuissant, car lui seul ne contredit pas mon désir du miracle. Puissance de rendre Dieu puissant.
Les religions sont les ruses de Dieu. L’Esprit est le Saint Bandit-Joueur.
La maîtrise d’un accomplissement suppose l’aveuglement à tous les autres : d’où la diversité des voies et les conflits religieux. La paix religieuse n’est possible que depuis une vue d’ensemble. Celle de l’Accomplissement suprême.
Dieu comme tout-Autre s’ouvre inlassablement à soi en se vidant de soi pour laisser place à l’autre — et c’est ainsi qu’il est créateur, c’est ainsi qu’il est amour.
La chair est l’espace où Dieu fait l’expérience de l’altérité absolue à soi, qui est ouverture absolue à l’Autre.
Dieu n’est pas sujet. Dieu est sans fond. En acceptant le retrait du fondement, en vivant l’effondrement, l’homme à l’image de Dieu devient à sa ressemblance.
Dieu est un artiste qui crée des artistes.